L'homme sans passé

Une Finlandaise me disait qu'ils "étaient sortis des bois" depuis les années 70 seulement. L'industrialisation s'était comme surajoutée aux communautés rurales et n'avait pas surgi de la ville. Mais quand l'industrie traditionnelle s'est étiolée cette dernière est apparue comme un espoir. Celle d'un nouveau départ. L'urbanisation récente est donc arrivée avec sa liberté et sa foudre.

Cela se voit dans le film, dès la première image, surtout lorsque l'un des trois agresseurs dépose son masque de soudeur sur le futur homme sans passé. Ce masque est une protection technique, mais il représente, aussi, et à la façon des masques amérindiens et africains, un lien statutaire, une manière d'être au monde.

Seulement ce lien n'est pas éternel quant à sa forme; il incarne certes le tout de l'humain. Mais il ne réduit celui-ci à celui-là. L'homme, dans le film, devient amnésique, mais son passé à lui est toujours là. Non seulement il s'adapte à sa nouvelle situation,il la transforme également, trouve un vrai travail, une compagne. Il est sans passé nostalgique. Et, pourtant, son passé de peau, de chair et d'humour s'entrevoit dans chaque image.

Le film n'a donc pas une vision acerbe mais ironique des changements sociaux, tout en préservant cette truculence populaire qu'ont toujours eu les ouvriers, du moins lorsqu'ils ne sont pas dévorés par l'alcool du désespoir.

Un tel film aurait été impossible à faire en France. En Belgique sûrement.