Exception culturelle ?

Qu'est-ce que "la" culture ? Tout ? N'est-ce pas présomptueux ? Et en matière de politique culturelle ne vaut-il mieux pas définir ce que la dépense publique peut aider ? Certes les acteurs. Mais pour les compagnies et les productions c'est moins simple. C'est qu'il faut bien considérer tout de même une chose : les constances de contenu allant dans le sens d'une réflexion ouverte qui construit au lieu de se contenter de détruire, faire de l'anti-art etc...

Car il y aussi cela : autant imposer un contenu n'est pas de mise, autant dépenser l'argent public pour n'importe quoi est problématique. Solution : que les professionnels compétents assis dans les jurys soient supervisés par une instance indépendante comprenant d'autres professionnels unanimement reconnus et qui surtout auraient un rôle "juridique" : les refusés pourraient faire appel, les débats seraient publics, les refus dûment justifiés.

Aurait-il fallu par exemple subentionner une exposition de ce genre :

Ainsi une exposition temporaire organisée par le Musée du Louvre et la Réunion des musées nationaux, (Commissaire : Régis Michel, conservateur en chef au département des Arts graphiques, musée du Louvre. 19 octobre 2001-14 janvier 2002), énonce dans son texte de présentation :

« (...) Et si c'était vrai ? Si la peinture, qui est, en Occident, le canon séculaire de la culture visuelle, n'avait été que ça : un crime contre l'imaginaire - carcan du corps, miroir de l'idéologie, outil du pouvoir, mystique de l'auteur, principe de tous les fétichismes et de tous les formalismes ? Si elle n'était rien d'autre qu'une machine à sublimer qui n'a cessé de servir le plus sournois des cultes, lequel se nomme, depuis Hegel, la religion de l'art ? On exagère à peine. La thèse n'est pas nouvelle. Mais elle est taboue. Pas touche au patrimoine.

On entend ici méditer à voix haute sur ce que l'on appellera, Bataille aidant, la part maudite d'une modernité qui est, comme on sait, d'obédience picturale. (...).Quelque chose se brise, autour de 1795, dans l'art d'Occident, jusque-là régi par le mythe solaire d'une Grèce introuvable. La révolution fait faillite. Et l'antique avec elle, qui n'est plus qu'un art officiel, voire un art censeur, où le péplum tue la vie. Tout se fige dans l'obsession du marbre. Or cet idéal puritain d'effigies asthéniques paraît souscrire au motif disciplinaire du panopticon, cher à Foucault, qui vise au dressage des corps (et plus). (...)Il s'agit de voir. Entendons : de voir autrement. Le travail de la différence est une expérience des limites qui répudie la violence normative -répressive- de la rationalité abstraite (celle des Lumières), laquelle finit, à en croire Horkheimer et Adorno, par se dévoyer dans l'horreur des camps. (...) «

G.Bataille et M.Foucault, -étudiés précisément ici- sont donc appelés à la rescousse comme cadres de références pour empêcher que la peinture se maintienne comme « violence normative –répressive » laquelle « finit » dans « l’horreur des camps ».

Commentaire du critique d’art Hector Obalk, (Le monde du jeudi 22 novembre 2001) ayant vu l’exposition mélant allègrement « au point de mettre en écho dans la même salle le destin de juifs en pyjama de 1943 avec la violence chiquée et narcissique d’artistes marginaux de 1965 (...) » :

« (...) Quel bénéfice y a-t-il exactement à « libérer » le corps du « contrôle rationnel de nos sociétés policées et répressives », si cette progressive « libération » du corps débouche en réalité sur l’imagerie sans fin de la violence, de l’humiliation, de l’automutilation et de toutes les tortures simulées que l’exposition multiplie jusqu’à la dernière salle ? On ne peut qu’en conclure qu’on vivait mieux « sous le carcan de la norme ». (...) »

Il se trouve que le « bénéfice « est à chercher du côté de cette intention d’empêcher la constitution de toute représentation et donc d’empêcher à la source la possibilité même d’une appréhension, d'un jugement. Je l'ai analysé dans ma thèse.

Mais ici le problème n'est même pas là et plutôt dans le fait de se demander si ce genre d'exposition ne pourrait pas être plutôt financée par des fonds privés émis par exemple par tous ces gens qui font leur carrière dans le nihilisme... Je ne vois en effet vraiment pas pourquoi il faudrait que cela soit l'Etat qui aide ceux sciant sciemment la branche sur lequel l'Art déploie ses branches.

Peut-être qu'entre la censure et le laisser faire laisser passer une autre possibilité pourrait émerger qui consisterait précisément en la mise sur pied d'un peu plus d'indépendance, d'objectivité, d'esprit public en un mot au lieu de s'en prendre à ce bouc émissaire nommé JM Messier ?