Saillies

La gravité supérieure du blasphème sur l'apostat

Esquisse d'une lecture de quelques signes urbains et humains

Quelques aperçus d'un lien aux animaux aux plantes à la nature en général

Le problème du droit d'ingérence

Pour une fête annuelle chômée de l'Europe Communautaire

Nihilisme et art contemporain

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La gravité supérieure du blasphème sur l'apostat

L'attentat à la discothèque de Tel Aviv n'est pas seulement l'expression exacerbée de désespérés plus ou moins manipulés pour certains d'entre-eux mais aussi et surtout le signe d'un totalitarisme en marche qui interdirait toute discothèque, même palestinienne. Voilà un exemple de blasphème : prétendre imposer aux humains une sentence supposée divine. Idem en Egypte, en Arabie Saoudite, en Algérie, en Iran, en Afghanistan.

Le fait que de plus en plus de soi-disants docteurs en théologie se targuent de parler "au nom de Dieu" en dit long sur leur outrecuidance blasphématoire, sûrs qu'ils sont de rester impunis.

Employons néanmoins le même code symbolique qu'eux pour bien se faire comprendre puisque le seul discours de la raison ne suffit pas : ne savent-ils donc pas tous qu'il n'est plus possible de traîner ainsi le nom de Dieu dans le sang humain versé par l'homme ? Dieu, dit La Bible, n'a pas tué Adam et Eve alors qu'ils lui avaient pourtant désobéi.

Comment se fait-il dans ce cas que des hommes prétendent savoir mieux que Dieu ce qu'il faut faire dire penser ? Comment ose-t-on tuer au nom de Dieu alors que lui-même ne l'a pas fait ? L'homme a été laissé libre, libre d'obéir ou de défier. Nul ne peut se lever contre son semblable, le mot de Dieu à la bouche : ces gens iront tout droit en enfer d'après le Livre qu'ils disent vénérer pourtant.

Il fut une époque où de tels gens auraient été immédiatement bastonnés et mis au pilori.

Certes certains trouvent un subterfuge en justifiant le meurtre par le fait que Mahomet aurait tué lui aussi. Mais Mahomet n'est pas Dieu. Il est humain. Et, humain, il a pu se tromper en croyant que Dieu lui donnait l'ordre de tuer : ce qui est impossible.

De même pour les Juifs lorsqu'il est dit que Dieu leur donne le pouvoir sur la Palestine en tuant tous ceux qui s'y opposeraient : c'est faux, Dieu n'a pu dire une chose aussi inhumaine. Aussi les Juifs doivent accepter que leurs frères par Ismaël vivent à côté d'eux et donc il faut, s'ils croient en Dieu, qu'ils leur facilitent les choses au lieu d'entraver aujourd'hui leur économie par exemple, jouant dans ce cas le jeu des parjures osant se réclamer du Plus haut pour mieux le trahir.

Les parjures se réclamant de la Bible et du Coran sont dans une conception horizontale et fermée de l'accès à Dieu : un point zéro annoncerait la Révélation et voudrait s'étendre au bout de l'Univers coûte que coûte. Certains chrétiens d'autrefois avaient fait la même erreur. Or Christ avait pourtant apporté la Bonne Nouvelle suivante : le Temps est Vertical : l'Accès au Ciel est permanent, sans début ni fin, sans entrave ni contrainte. Coeur à coeur. Intimité et liberté. Rendez à César...

Quant à l'apostat, nul ne peut décider que tel ou tel ne peut pas changer de religion. C'est encore une fois faire preuve de blasphème. Ce n'est pas parce que l'on prétend être la dernière religion que l'on a le droit de parjure.

On pourrait d'ailleurs renverser la sentence : les Berbères étaient par exemple chrétiens sous Rome. ST Augustin en est l'illustration, parmi d'autres, aussi illustres. Dans ces conditions tous ceux qui ont embrassé depuis une autre religion devraient être immédiatement envoyés en enfer.

Aussi ceux qui désirent revenir dans la religion de leurs ancêtres peuvent le faire sans crainte. Aucun pseudo "docteur" n'a le droit de leur interdire quoi que ce soit. Il existe par exemple une église catholique d'Algérie. Personne ne peut empêcher les algériens de revenir à la religion de leurs ancêtres s'ils le veulent.

Les Berbères étaient chrétiens bien avant les Francs. La France a replantée des graines dans un sol qui les avait déjà nourries.

Un tel langage employant le code symbolique du religieux peut choquer le rationaliste intégriste ou du réseau Voltaire. Mais au risque de paraître illuminé, il s'agit seulement de signifier qu'il existe des niveaux de discours et de vérités que le seul rappel aux Droits de l'Homme ne suffit pas à rassasier. Certaines questions ne peuvent être abordées qu'ainsi dans le code adéquat.

Il faut donc savoir parler autrement : également. Du moins dans la mesure de son possible. Mais le discours religieux doit aussi apprendre à respecter les lois des hommes distinctes de celles de Dieu, surtout lorsqu'il se maintient par des pratiques si sanguinaires ou si obtues qu'elles contrecarrent plutôt qu'elles n'accompagnent les évolutions historiques du phénomène humain.

Esquisse d'une lecture de quelques signes urbains et humains

La promenade urbaine est une galerie, un écran gigantesque, les rues sont des films, les bars des théâtres, d'où l'on peut se reconstituer un imaginaire autrefois représenté par l'Art qui a pour une part disparu aujourd'hui tant il a été happé, figé, pillé par une certaine industrie affairiste mais aussi par les adeptes de l'anti-art.

Ils ont tous fait main basse sur lui. Et ils s'emparent de plus en plus de sa source, celle des fantasmes, ils colonisent les émotions, ils rongent les sentiments, pour ne voir qu'un corps-meccano assemblé avec frénésie par les désirs codifiés dans la mode du moment.

Mais le mot ment parfois. Du moins lorsqu'il n'est pas lesté. Amusons-nous dans ce cas à laisser de côté les prismes désuets et destructeurs pour tenter de déchiffrer sans flétrir les signes au-delà des apparences programmées afin d'y dégager les semences "urbano-humaines" par une analyse capable de nous protéger de cette manipulation des apparences et des sens.

Ce sont des blocs d'interaction entre l'humain et l'urbain qu'il s'agit de glaner ici et là dans le ressac des travaux et des jours en leur donnant un zest de sens, mais pas plus, puisqu'il n'est pas possible, bien entendu ici, de faire autre chose que d'esquisser une impression, en aucun cas affirmer une systématique .

Tiens ? Ici une jeune fille dévoile son nombril, cercle ensorcelant qui attire pour mieux repousser, montrer son désir d'appartenance sincère et entière, désir d'être enceinte de soi-même enfantant le monde, enceinte du désir d'être encore plus envoûtante que l'affiche et la vidéo, le corps fait ainsi son cinéma pour montrer qu'il est aussi son propre média, et sera donc toujours plus attractif qu'une image uniquement virtuelle, la rue ( the Street ) a toujours un coup d'avance, heureusement.

Le nombril aspire et respire la beauté urbaine, suc des signes en sustentation soudaine. Il dit toute sa sensualité d'image fatale, sonnerie urbaine, passage délicat dans une dimension sournoise, espiègle, monde des BD et des grandes couettes, grands bols multicolores, amour grenadine certes, mais aussi vache, vagues de sens à la recherche du vaisseau amiral, du radeau de la Méduse, cisaillant parfois tous ces matelots mâles urbains qui ne comprennent pas qu'il ne faut pas toucher, à peine regarder, oublier qu'une chair, juste, prend son envol vers l'intérieur de leurs désirs et qu'il est de leur devoir de la séduire et, lui, le Nombril, de leur résister. Du moins tant que répulsion reste supérieure à l'attraction.

Dans le cas contraire, l'heureux élu aura su montrer que son nombril est lui aussi la porte de la Caverne, celle d'Ali-Baba, de Platon, cercle d'un tourbillon de sens dont le vertige amène vers la lumière ou son aveuglement.

Et là ? ce diamant dans la narine gauche ? Un point d'ancrage du cerveau droit et ses émotions rampantes bombant leurs torses d'espaces-sens. Le diamant dit : dorénavant plus personne n'écrira sur ces espaces autre chose que moi, ancre, je le déciderai, je jette donc l'ancre et je veux que tout le monde le voit.

Sourcil droit ? L'hémisphère gauche a du mal dans la prise de décision, il ne se rappelle plus sur quel pied danser, le percing à cet endroit est un point de fixation dans tous les sens du terme.

Marqué ainsi le corps concède qu'il est un fleuve, un moment flottant d'images en continu dans la fondue enchaînée permanente urbaine, peut-être, mais par ces diamants il marque qu'ici une conscience existe aussi, pas seulement un enchaînement de pulsions. Dorénavant la narine gauche saura mémoriser les odeurs hostiles, les suintements hâtifs, les sécrétions stridentes des machines désirantes de plus en plus déglinguées sans mécaniciens, morts, elles font trop errer leurs crocs droit devant. Se casseront-ils sur la pureté du diamant ?

Mais la langue percée ? Justement. Le juste ment, disait Arthur R. Du moins s'il ne s'en tient qu'au principe et surtout ne l'applique pas, c'est ainsi que percée, transpercée de bons sentiments, la langue montre le résultat : sa béance de sens, trou noir des perceptions percées d'où s'échappe une lumière désespérement à la recherche de sa constante, celle de la promesse et de sa réalisation.

Cette constante est difficile à trouver.

Il y a là d'ailleurs comme une donnée générale : plus le corps réagit, s'active, plus il s'approprie la ville et n'a pas besoin de marques extérieures. Par contre plus il s'abime, en fuite du monde tout en s'y cognant au trop de lumière, plus l'âme fuit d'une chair percée de partout, perdant de son épaisseur, se maintenant en première et en seconde dimension seulement, celles de l'élastique, et plus il faut colmater les trous de l'âme en tenant de la fixer par les marques des totems et des mémorandums que sont devenus les bijoux et les tatouages, offrandes au corps-autel à la recherche d'une adéquation perdue entre le mot et la chose.

L'autre signe probant du bloc d'interaction humain-urbain s'observe dans toute cette fluidité vive que tisse le public des glisseurs, patineurs et plancheurs. Cette glisse tente, semble-t-il, de s'approprier le dynamisme de la vie en ville en y ressentant plus intimement la vitesse interne. Celle qui s'aperçoit dans les matrices des flux d'informations multiformes, des blocs électro-plastiques auto mobiles, des tracés et autres fulgurances médiatiques. Mais aussi celle qui se décèle au coeur des sentiments et des émotions mis de plus en plus à l'épreuve dans le chaudron urbain.

La vitesse d'ébullition de ce dernier est aussi un autre signe à déchiffrer.

Sa température est telle que le jugement, qui règle le conflit permanent entre l'émotion et le sentiment, a d'autant plus de difficultés à filtrer le bombardement incessant des incitations qu'il doit trancher ce qui est bon ou mauvais dans l'instant du phénomène humain-urbain. C'est-à-dire dans cette immédiateté intersecticielle d'espoirs et de destinées, d'opportunités et de fatalités, instant-tourbillon donnant l'impression parfois que tous les chemins de la réalité et de l'imaginaire mènent tous à la même Rome.

L'impression s'y tricote alors des apparences sur mesure, pensant qu'il suffit de changer de réel comme l'on brise un rêve, ou que l'on enfile une nouvelle veste. L'instant humain-urbain donne le sentiment que tous les possibles peuvent se tisser dans l'innocence anonyme émanant de la coexistence en apparence pacifique entre tous les instants d'instant : ici mari, là amant, là-bas menteur, ici politique, plus loin, dans l'obscur, mafieux, pervers, perdu, perdant, malgré son corps imitant les affiches aux visages d'anges et/ou de démons bien sûr puisque le diable était le premier des anges faut-il le rappeler.

But who's care ? Le sentiment de rêver sa vie donne parfois le sentiment de n'être qu'une image parmi d'autres, série tv avec unique spectateur, bobine de chair défilant son fil dans les méandres, tout cela forme vitesse certes, mais négative, celle d'une machine emballée mais sans frein.

Il s'agit de lui échapper. Et donc esquiver ses tampons avides et vides, en se battant pour l'appropriation du contact seul, dans le corps à corps à la recherche d'une essence vive, d'où la glisse, essence émanant des signes forts, constructeurs.

Par exemple à Paris toute cette magie des ponts métalliques et anciens, tout le musc des monuments, et la présence tranquille malgré son tumulte, de la Seine, où l'on refroidit enfin sa chair urbaine jusqu'à ce qu'elle nous cristallise finalement en la goutte ultime de sens, perle secrête au creux de l'eau interne du coeur qui bat.

Cet éclat chuchote alors dans le murmure des flots ceci : si les flux et les berges changent, la puissance de maîtrise est sans cesse potentiellement là comme un firmament au-dessus de l'orage. C'est de ce firmament au creux de son silence au bout de l'univers à la pointe du dernier cri, crissement de sens, qu'il faut puiser,épuiser la vitesse. Car il s'agit d' atteindre le ralenti nécessaire qui disloque le bloc d'interaction human-urbain, pour voir ce qui s'y cache, cloche, pour étudier les tintements et autres tentations, tentures, teintures.

Pourquoi d'ailleurs, à propos de teinture, tant de cheveux blonds et de crinières blondes s'affichent sur les noirs, noires, beurs, beures, tous ainsi en artifice, en fantasme ambulant parfois ? Peut-être un désir en propre de doubler, tribler, la férocité glacée de la société techno urbaine et ses images en majorité uniquement blanches.

Les gens de couleur n'échappent pas une double contrainte. La première concerne en fait tout le monde et elle pose la question de savoir si on peut aller plus vite que la vitesse d'attraction des médias pour s'en protéger, pour maîtriser la passivité de la seule consommation.

La seconde contrainte informe qu'ici, en France l'on ne naît pas Citoyen mais on le devient. Car il faut déjà le devenir me semble-t-il pour prétendre s'occuper des affaires françaises.

Mais cela ne signifie-t-il pas également que l'accession pourrait aussi se percevoir dans l'image médiatique ? On devrait enfin comprendre que nous sommes passés à la couleur depuis longtemps maintenant.

Quelques aperçus d'un lien aux animaux aux plantes à la nature en général

Il n'est pas si étonnant de pressentir que les animaux et les plantes mai aussi les minéraux ne sont pas seulement des réserves d'énergies mais aussi les permanences sensibles de nos formes antérieures, du moins si nous acceptons l'explication stipulant que l'embryon pour devenir foetus passe par tous les stades de l'évolution . Peut-être reste-t-il alors quelques résidus de leurs formes vivantes dans nos cellules qui nous interpellent ou du moins nous donnent cette impression diffuse de perpétuer leur destin ?

Il ne s'agirait cependant pas seulement d'une connexion physiologique comme l'absorption nécessaire des métaux par la respiration et la nourriture, ni de l'emploi des mêmes fonctions sensitives comme l'a montré Darwin en comparant les émotions humaines et animales par exemple.

Il s'agirait déjà du déploiement du même souci de développement et de connaissance de son environnement. Lorsque la fourmi, le chien, sont sans arrêt en mouvement, il ne s'agit pas seulement de recherche de nourriture mais d'un sentiment de curiosité justifiant le désir de vivre : la fourmi furète sans cesse pour montrer à l'ensemble fourmilière qu'elle porte la brindille supplémentaire en vue de la sauvegarde du groupe. Le chien renifle sans cesse pour décoder les odeurs des congénères et lire ainsi leurs histoires, ce qu'ils deviennent. Ils ne sont pas seulement dans la reproduction, mais leur création est cependant limitée.

Il s'agirait alors d'imaginer autre chose, une hypothèse certes hardie et qui spéculerait que lorsque nous agissons, y compris seulement dans une pensée, l'animal viendrait en nous en ce sens que nous formerions aussi l'apparence de l' animal le plus capable de supporter la pensée mise en forme. Voilà peut-être pourquoi la sagesse hindoux par le yoga en dessine la géométrie.

Mais la sagesse populaire n'en est pas si loin lorsqu'elle traite quelqu'un de vautour, de crocodile, de renard, de hyiène ou de lion. Sauf que dans notre hypothèse nous dirons que la pensée pour s'asseoir dans son contenu a besoin de se calfeutrer empathiquement, phénotypiquement, tel le caméléon, dans la forme même de tel humain référence mais aussi de tel animal afin d' y saisir, d'être, son objet.

L'animal en nous atteint ainsi par l'humain le côté créatif qu'il ne pouvait posséder du fait de son déficit en traitement neuronal et en tri des informations, d'où le surcroît de sensations fortes, d'émotions triomphantes et grisantes.

Prenons pour illustrer cette affirmation l'acte de nourriture, mais aussi le besoin de voir les plantes, de s'y calfeutrer, de les offrir.

Lorsque nous mangeons, il ne s'agit pas seulement me semble-t-il d'emmagasiner des métaux et de l'énergie vive que notre métabolisme exige. Il s'agit aussi de conjuguer nos états du moment avec leurs correspondances en termes de choix d'animaux à manger, de plantes à regarder, voire de paysages. Nous avons besoin vitalement de nos correspondants. On voit bien cet aspect lorsqu'il s'agit de s'abreuver symboliquement par la présence de tel tableau, livre, film, être aimé, que l'on n'a pas vu depuis longtemps.

A certains moments dans un certain état nous aurions donc besoin d'être l'animal capable de supporter le processus de pensée qui cherche son déploiement. Est-ce que cela voudrait-il pour autant que lorsque nous mangeons du lapin nous voulons rattraper notre vie mais qu'il est toujours trop tard ? La réponse me semble négative, même s'il est tentant d'établir un lien entre la prise de telle nourriture et la forme animale recherchée pour reproduire à l'intérieur de soi, la forme, l'exo-squelette psycho-physiologique adéquat pour supporter au sens littéral la forme choisie.

Par contre l'on y consomme semble-t-il la projection que l'on transfère sur l'animal. Manger du saumon, du caviar, du lièvre plutôt que du lapin n'est pas seulement affaire de goût ou d'ostentiation. Avoir aujourd'hui le dégoût de manger du poulet ou du boeuf proviendrait de notre prise de conscience devant le carnage inutile, surtout lorsqu'ils sont malades.

Il y aussi quelque chose d'autre, un peu plus inoui peut-être, mais qui viendrait parfaire cette hypothèse de la correspondance homme-nature. Il faudrait imaginer celle-ci en une espèce d'Esprit qui ne penserait pas seulement à partir de l'homme comme le croyait Hegel, mais à partir de l'ensemble immédiat de la nature voire de l'univers et qui ferait un malgré ses différences, et qui signalerait par des franchissements de barrière inter-espèces ce qui va ou ne va pas du point de vue du Tout.

Dans cette hypothèse, -qui je le conviens est difficile à admettre mais qui mériterait peut-être d'être creusée, du moins du point de vue spéculatif avant d'en faire une heuristique-, il serait admis que les virus ne seraient pas les seuls signes à l'assaut des espèces. Il n'y en aurait d'autres qui cependant s'adresseraient seulement à ceux et celles en mesure de porter un devenir créatif pour l'espèce humaine, mais aussi toutes les espèces, l'espèce humaine étant la dernière, la gardienne, des choix de l'Esprit.

Penser le tout en tant que tout signifierait dans cette hypothèse que la tempête de 99 exprimerait aussi autre chose : peut-être une "colère" devant l'état délabré de notre air urbain, devant la production sans frein de viandes inutiles, devant enfin la disparition d'espèces.

Mais s'il est possible de penser cela d'un point de vue onirique, spéculatif, il faudrait se garder de croire que les violentes moussons sont des réponses violentes de l'Esprit devant l'incurie des hommes. Tout évènement naturel, souffle, croassement ne sont pas nécessairement des signes destinaux, telle la pomme qui serait tombée selon la légende sur la tête de Newton.

Les parts d'accidents, de conjonctions circonstanciées sont probantes. Néanmoins il est possible d'imaginer sur un mode encore une fois onirique qu'il en est parfois un peu ainsi, et que dans le murmure du vent se calfeutre parfois aussi autre chose qu'un souffle physico-chimique comme le disait Proust du côté de chez Swann.

Ainsi les hurlements du Cap Horn par exemple vidangeraient aussiles ondes humaines, terrestres, et telles les âmes dans l'Enfer de Dante, elles expulseraient leurs impulsions souffreteuses et négatives.

Cette pensée est possible si et seulement si on ne prétend pas en faire autre chose qu'une spéculation, peut-être une piste, pas plus.

L e problème du droit d'ingérence

L'insolence et l'arrogance ne manquent jamais d'aplomb. Il en est ainsi de ces pays comme l'Algérie, la Chine, dont les gangs au pouvoir ou à sa marge pillent tuent en toute impunité tout en se permettant de crier à l'ingérence lorsque la Communauté internationale fait mine de s'en offusquer. On croit rêver.

Or l'ingérence est bel et bien un impératif catégorique lorsque les droits fondamentaux et universels de l'homme sont bafoués,foulés aux pieds, violés, par des soit disants sauveurs de l'Humanité. Car il n'y a pas plusieurs conceptions des droits de l'homme, comme le prétend le pouvoir autoproclamé chinois, qui a eu son heure de gloire en 1949 mais maintenant a failli et aurait du rendre la Chine aux chinois, mais seulement différentes formes et façons de les appliquer.

Il est en fait regrettable que les USA aient accepté en fin de compte que la Chine entre dans l'OMC, alors qu'ils ont été eux-mêmes exclus de la commission des droits de l'homme de l'ONU à l'instigation de cette même Chine, ce qui est le comble de l'absurde y compris du point de vue de la realpolitic.Et on n'a guère entendu ni vu de protestations contre la peine de mort en Chine alors qu'elle tue des milliers de fois plus qu'aux USA...

Il est également dommageable que nombre de dictatures puissent prétendre à ce genre de reconnaissance institutionnelle. Voire qu'on leur prête de l'argent qui disparaît en Suisse tandis que leur peuple souffre de plus en plus.

Certes l'on peut rétorquer que le boycott ne donne rien, ni à Cuba ni en Irack, et qu'il vaut mieux espérer en ce que le doux commerce pour parler comme Yves Michaud ait raison du totalitarisme, du moins à terme, en rongeant peu à peu ses dents austères et policières avides de gain et de consommation.

Mais il ne faut pas confondre le fait de commercer et le fait d'intégrer ce commerce dans un cadre avantageux.

Ce serait en fait très judicieux d'arrêter d'acheter du pétrole et du gaz à l'Algérie et à tous les autres pays totalitaires.

L'Algérie a truqué les dernières élections, un reportage sur Arte l'a bien montré, il est temps d'en appeler au boycott comme au temps de l'Afrique du Sud. Puisque dans ces pays c'est le peuple même qui est séquestré, humilié, pressuré.

Bien sûr les Etats démocratiques peuvent objecter qu'ils ne peuvent du jour au lendemain appliquer une telle politique et que l'exemple irakien encore une fois démontre que les dictateurs sont prêts à sacrifier leur peuple.

On peut répondre que d'une part l'exemple irakien apparaît de plus en plus comme une épreuve de force entre les USA et leurs alliés britanniques d'un côté, Hussein de l'autre, même si la dangerosité de ce dernier est évidente en matière nucléaire et chimique. Or il semble bien que s'il était décidé au niveau mondial que dorénavant le commerce ne peut être dissocié du respect des droits de l'homme, les dictateurs auraient beaucoup plus de mal à justifier le sacrifice de leur propre peuple.

On peut répondre d'autre part que rien n'empêche d'ors et déjà la société civile mondiale de se mobiliser, signer des pétitions, créer un réel courant d'opinion favorable au boycott des pays non démocratiques s'ils continuent de nier l'évidence.

On s'apercevrait alors que les actuels appels à la taxation mondiale des surprofits financiers feraient bien pâle figure à côté d'une telle exigence et que d'aucuns refuseront un tel boycott, de peur que la démocratie revenue les peuples libérés voguent vers ce plus de liberté et de prospérité que certains austères exècrent.

Tel est en tout cas l'enjeu à venir : se lamenter de l'état du monde en s'en prenant exclusivement aux USA et aux instances internationales. Ou exiger que l'on cesse de faire la courte échelle à des régimes non démocratiques et que l'on réforme l'ensemble des institutions mondiales pour les rendre plus efficaces dans la solidarité entre les peuples.

Pour une fête annuelle chômée de l'Europe Communautaire

La fête annuelle de l'Europe devrait être chômée. Les gouvernements se réuniraient pour une grande cérémonie avec un défilé militaire et civil. Les médias inviteraient des représentants européens et ils parleraient des choses qui nous inquiètent.

Les gouvernements peuvent aussi profiter de l'occasion pour échanger des hauts fonctionnaires d'une année sur l'autre. En un mot il serait opportun de susciter des occasions de rencontre. Les chaînes publiques pourraient de plus en plus inviter les autres responsables politiques européens au lieu de laisser le débat franco-français s'enliser dans la diabolisation de l'économie privée d'un côté, de l'esprit de régulation de l'autre.

L'importance est de tisser de plus en plus des liens symboliques suffisamment forts pour créer le sentiment de se vouloir aussi européen. On ne peut d'un côté prétendre construire l'Europe et ne rien faire pour que les peuples affirment institutionnellement leur individualité. C'est en apprenant à connaître la façon de penser et de faire de l'autre que peu à peu émergera le sentiment stipulant que se sentir européen c'est aussi le traduire peu à peu dans les institutions.

Nihilisme et art contemporain

Le présupposé nihiliste qui existe depuis Blanchot et Bataille et qui justifie les dérives d'une certaine "presse artistique" par exemple celle du magazine " Art press" et spécialement l'une de ses responsables dont le livre a défrayé la chronique dernièrement se résume en ceci :l'art est supposé mort, détruit par l'industrie, le capitalisme, et ce qu'il faut, c'est faire comme eux, si l'on veut représenter justement cette mise à mort.

Car il ne s'agit pas de peindre le meurtre de César mais d'être Brutus dit Blanchot reprenant le mot de Nietzsche sur Lucrèce Borgia. L'ajout de Bataille consistera à exiger que la vie se dépense avant d'accumuler de l'énergie pour devenir action car celle-ci par son ordre crée la maîtrise, la mesure, le bourgeois.

Par la suite Foucault, Deleuze, Lyotard, et aujourd'hui Derrida, ont appliqué ce programme : comment empêcher que le corps humain se développe ? Puisque le réformer est impossible. Car le désir d'être vient du tréfond. Le marxisme croyait en la possibilité de le transformer. La lecture de Nietzsche montre à ceux-ci que la volonté de puissance se veut elle-même. Dans ces conditions, même dans une société adéquate à l'idéal révolutionnaire, les hommes voudront.

Le seul moyen de contrecarrer cette donnée ontologique consiste à assêcher à la base toute velleité de construction. Pour y arriver il faut détruire tout repère, critère, valeur, sur lequel la volonté peut s'appuyer pour avancer.

La tactique visera à "étendre le domaine de la lutte", comme le clame également l'une de leurs plumes récentes, à tous les terrains : l'art bien sûr qu'il s'agit de détruire minutieusement et jusqu'au corps de l'artiste. Mais aussi la sexualité qu'il faut bien entendu exploser et surtout le couple à la stabilité suspecte, source de puissance et donc de pouvoir, pour y substituer une politique du détruit, du corps expurgé de toute synthèse possible, toute capacité de dire oui ou non, y substituant la culpabilité d'avoir fantasmé seulement sur un corps de femme lorsque l'on est homme, ce qui est très mal vu par le Code N.

C'est-à-dire le code de l'indéfini, de l'errance informe qui attend son plaisir comme un garnement attend sa fessée, et recherche sa cristallisation dans le seul regard d'autrui ou dans la demande indifférente d'accouplement, d'enchaînement plutôt, et à la façon industrielle : chaîne de montage et vidéo, puisqu'il faut imiter le capitalisme.

Sauf qu'ici cela s'apparente plus à du bégayement, du machinisme à deux dimensions esquissé par le cubisme de Picasso : le corps est sommé de n'être qu'amas de pulsions, sac de billes, sinon rien. De peur qu'il s'organise, trie, s'affirme, s'affine, s'élève, se limite, s'envisage. Ce qui est mal pour le Code N.

Le Code N, nihilisme d'aujourd'hui, ne se contente plus donc d'expérimenter en coulisses sur des victimes volontaires puis d'en décrire les effets dans de beaux livres comme le fait encore Derrida récemment sacralisé " saint " par l'une de ses fans.

L'expérimentateur façon, fashion art press, se livre lui-même au vu de tous et étale la confiture que l'on dégustait déjà dans les sex shops des années 70, moins les virgules et avec un peu plus de froideur clinique : mort sexuelle de Catherinette M.

Bataille l'avait déjà montré trente ans plus tôt : il ne s'agit pas de transgresser bien entendu mais de dire oui à tout, non à rien. La sexualité dans ce cas n'est plus l'articulation d'une rencontre à la recherche de sa propre géométrie spatiotemporelle et multidimensionnelle. C'est plutôt de la platitude caoutchouteuse qu'il faut salir pour décevoir là aussi toute tentative de ravissement qui ne serait pas le produit d'un lâche soulagement.

Car le nihilisme d'aujourd'hui a un second présupposé, politique celui-là : nous sommes tous dans un camp de concentration, celui du néolibéralisme. Avoir une vie sexuelle une vie tout court est impossible sans être de l'autre côté du manche. Dans ces conditions seule la mort suffocation enfouie dans ses propres décombres peut être mise en scène. Etre un couple, vivre un amour, semblent être sinon des supercheries du moins des niaiseries.

Voilà pourquoi une levée de boucliers s'est faite jour récemment contre " le destin fabuleux d' Amélie Poulain". Amélie est à contre-courant du mot d'ordre nihiliste actuel marginalisant la norme, et normalisant la marge, cela ne se fait donc pas.

Son parti pris indiquant que le sexe machine n'est qu'un moment et non le tout de la question, fait alors scandale depuis qu'il a été décidé en haut lieu que l'amour n'existait plus, précipitation chimique voilà tout, ou n'était que le prétexte bourgeois pour échapper au réel.

Le tribunal se réunit, on accuse Amélie de lepénisme car elle semble trop se la jouer Jeanne d'Arc en aidant ses voisins à se libérer de leurs démons. Et puis elle se confine dans un quartier-village entourée de gens qui ne cherchent pas à détruire le néolibéralisme, ce qui est mal.

Puis l'avocat général, inrockuptible à ce que l'on dit, dénonce cet esthétisme de pub alors que celle-ci lorsqu'elle se détâche de la réclame dans les années 60 s'approprie précisément tout l'esthétisme issu du surréalisme, du dadaïsme, de l'expressionnisme et du futurisme russe, qui traverse de part en part ce film entre les clins d'oeil et Montmartre, dont on ne savait pas qu'il était le quartier préféré de l'extrême droite.

Enfin, tare suprême, les parents des gosses regardant Loft Story aimeraient avoir Amélie comme belle fille, c'est dire. Et puis pourquoi Jeunet ne sait pas que tout beur est arabe, les Kabyles vous le diront, et il ne doit pas s'appeler Lucien, mais Momo bien sûr.

Ainsi Amélie dérange, ce qui est le comble d'ailleurs tant on vous assure qu'il est insignifiant, désuet, ridicule, ennuyeux, niais évidemment puisque ce "film" ce clip plutôt ne parle même pas de SM et ne montre rien, c'est vous dire.

On le voit, les petits bourgeois à la tête des médias à la mode qui se déculpabilisent de leur fric facile en voyant la misère du monde partout sauf dans leur tête ont peur qu'un immigré s'appelle Lucien et donc devienne aussi français comme des centaines de milliers d'Italiens, de Portugais, l'ont fait.

Cette peur est au fond conforme au souhait de ne voir le monde qu'en fonction de ce que l'on y filme : les immigrés à leur place culturelle désignée, les papillons en haut, dénonçant tout et rien, confortablement installés dans de la soie "radicale". Cette soie portée par ceux qui se veulent si égaux qu'ils le deviennent plus que tous les autres.

Le comble est atteint dans ce film pour le Code N parce qu'il est question de gentillesse, de tendresse, de recherche courtoise d'un filon fou, unique, secret, celui des regards invisibles qui transcendent un sourire, un geste, une tasse de thé prise ensemble en regardant Paname au fond de l'âme, oh là là !!! que c'est laid ! Bien loin de la vraie vie des vrais gens, comme Isabelle Huppert dans La Pianiste par exemple, code de conduite par excellence du Fashionable Nihilism.

LSO

Juin 2001.