Communiqués En vrille

19 juillet

Signaux contradictoires du Nord au Sud, et hypocrisie des gouvernements européens vis à vis de leurs propres Commissions

Il existe semble-t-il une contradiction entre dire qu'il faille aider le Sud à se développer, par exemple dans son agriculture et son industrie, et, en même temps, déverser des produits agricoles subventionnés sur ses marchés émergents, tout en lui refusant la baisse des droits de douanes pour ses exportations. Les USA et l'UE pratiquent cette gymnastique cynique.

Il ne suffit pas d'expliquer que cela ruinerait des pans entiers de l'économie pour la justifier lorsque l'on sait que depuis des années des approches électoralistes ont empêché d'effectuer des réformes en profondeur permettant d'accompagner économiquement et surtout humainement les restructurations; le cas récent de la pêche en est l'exemple le plus criant.

De même lorsque la Commission Européenne propose par exemple de réformer la Politique Agricole Commune, (à l'horizon 2006), elle ne le fait pas en vue d'empêcher que la France reste le second exportateur mondial de produits agricoles, mais bien parce que la course à la subvention est devenue, surtout pour les grandes exploitations, (20% des exploitations se partagent 80% des subventions), le principal leitmotiv de production, au détriment souvent de la qualité, comme l'a démontré le cas (d'école) des farines animales.

Le problème en fait n'est donc pas tant de voir des complots partout et imaginer que les Commissaires défendent les intérêts de leurs pays respectifs, jetant ainsi l’opprobre et la suspicion sur l'honneur de hauts fonctionnaires, mais que la classe politique américaine et européenne préfère caresser dans le sens du poil leurs électorats respectifs plutôt que d'accomplir une politique non pas d'austérité, sèche et brutale, mais ouverte vers le futur et vers le monde en ce sens qu'elle planifierait et accompagnerait les mutations, du moins celles qui sont prévisibles.

Il est temps d'admettre par exemple que le Nord se spécialise de plus en plus dans les industries de pointe et que se profile à l'horizon l'agriculture de qualité, la néo-ruralité, le tourisme, les échanges culturels et "éducationnels", les transports propres à base d'hydrogène,l'énergie renouvelable. Tandis que le Sud -tout en ne négligeant pas ces nouveaux domaines, se spécialise profondément dans les métiers aujourd'hui en voie de saturation au Nord et/ou engoncés dans des désuétudes et autres désenchantements, sans oublier les réglementations et les droits sociaux qui les rendent à la fois prohibitifs et peu rentables.

On voit d'ailleurs cette division se réaliser au sein même de l'immigration du Sud venant au Nord lorsqu'elle vient faire des métiers que les gens du Nord ne veulent plus accomplir.

Bien sûr d'aucuns peuvent rétorquer que justement le déficit du droit social des pays du Sud et la brutalité des délocalisations dans les pays du Nord empêchent de raisonner ainsi et qu'en fait la mondialisation s'est restreinte à une globalisation des économies d'échelle sur fond de manipulations financières, délits d'initiés et corruption comptables, ce qui nécessiterait d'interdire les délocalisations, de taxer les flux financiers, de convaincre les pays du Sud à ne pas adopter le style de la société de consommation occidentale, appauvrissant et destructeur de la planète.

Hélas la réalité est plus complexe puisque par exemple le Sud a bien plus affaire aujourd'hui au défi urbain, c'est-à-dire au phénomène, conjoint, de la technique et de la ville, à ce que cela veut donc dire que de "monter à la ville" comme on le disait en France dans les années 30-50, qu'à la seule emprise des volontés de puissance négatives profitant de la complicité de ses propres élites locales pour s'enrichir avidement.

Ce n'est pas en proposant plutôt la frugalité au lieu du confort que l'on arrivera à faire admettre aux peuples"qu'il faille réguler" alors qu'ils ont été privés de tout pendant des dizaines d'années par des élites néo-aristocratiques comme le furent au fond les régimes communistes, ou par des élites néo-coloniales, telles qu'elles se comportent encore en Amérique du Sud et en Afrique.

Le Nord peine de toute façon à s'entendre au niveau mondial pour façonner les institutions adéquates aux exigences d'une régulation mondiale. De l'autre côté les mouvements dits "antiglobalisation" ont oublié que pendant des années leurs têtes pensantes ne sont pas battues pour réformer "le Système" dans ce sens là mais en vue de le détruire purement et simplement.

Il n'est dans ce cas pas étonnant d'observer que l'absence de contre-pouvoirs issus de la société civile face à la quasi-unanimité d'une classe politique productiviste et quantitativiste, ait engrangé un retard considérable en matière de régulation planétaire, ce qui alimente, qu'on le veuille ou non, la justification antimoderne des courants totalitaires de tous horizons et de plus en plus à l'unisson dans la haine et la rancœur.

Donner des lecons au monde avant de balayer devant sa porte, c'est encore une fois réitérer l'histoire de la paille et de la poutre. Au détriment de tous, planète comprise, même si celle-ci ne va pas aussi mal qu'il est prétendu par ceux dont le refus d'appeler à la réforme plutôt qu'au renversement aggrave au lieu de soulager les pollutions et les inégalités.

14 Juin

Liberté de philosopher et Service Public


Une étrange polémique s’envenime au sein de l’Education Nationale sur la manière de transmettre la philosophie. Rappelons les faits qui risquent de dégénérer puisque certains opposants menacent d’opérer une rétention de notes du bac et doivent se réunir en AG avant la fin du mois de juin.

Plusieurs associations d’enseignants en philosophie s’insurgent contre l’introduction depuis juillet 2001 d’une nouvelle manière d’aborder un certain nombre de notions clés. Celle-ci –dite réforme Renaut- consiste à ne plus se satisfaire d’exposer une trentaine de notions et une liste d’auteurs tel que cela se fait depuis 1973 –laissant libre choix à l’enseignant de les traiter comme il l’entend, mais de coupler certaines notions entre-elles, tout en indiquant les points de repères sur l’histoire de la philosophie et tout en désignant des questions dites d’approfondissement.

Cette réforme a pour objet selon ses partisans de réduire les inégalités en matière d’accès au savoir philosophique puisqu’en indiquant avec quelles orientations doivent être étudiées ces notions dans leur programme national, cette réforme permet aux élèves de s’y retrouver et d’être mieux armés pour passer le bac, surtout au vu des résultats passés montrant que huit candidats sur dix ne dépassaient pas 10 de moyenne.

Cette réforme a néanmoins suscité de vives oppositions. Elle a été suspendue par Jack Lang cette année et celui-ci avait nommé Michel Fichant pour faire en sorte de revenir à la situation d’antan.

Il s’avère que les propositions de ce dernier ont été repoussé par deux organismes consultatifs importants, le CNP (Conseil national des programmes) et le CSE (Conseil supérieur de l’éducation) qui regroupent des syndicats enseignants des associations de parents et de lycéens. Or les enseignants opposés à la réforme Renaut leur dénient toute légitimité et somment le ministre de ne pas suivre leur indication en avançant qu’il faut laisser aux enseignants la totale liberté de philosopher "consubstantielle" selon eux « à la philosophie elle-même » (Libération du 13 juin 2002, p. 16).

Cette polémique est révélatrice sur deux plans au moins.
Déjà parce que pour certains la notion de « liberté » doit être totale dans certains domaines, par exemple l’enseignement et les mœurs, mais doit être limitée voire contrainte absolument en matière économique et politique. Ensuite parce que la notion même de service public semble être mise de côté, ou alors identifiée à la liberté individuelle d’interprétation.

Entamons la réflexion uniquement sur ce second point.
Que de manière générale la liberté de penser, et, plus précisément, que la liberté de philosopher soit garantie et encouragée dans la société et pour chacun, c’est l’évidence, surtout en régime démocratique, et même si cela n’a pas été toujours le cas et qu’il fallut se battre pour l’obtenir.
Mais lorsqu’il s’agit de l’enseigner, surtout au sein d’un cadre public ou conventionné, le fait de s’appuyer sur le seul droit constitutionnel de « la » liberté ne suffit pas puisque celui-ci ne s’applique pas ici dans un domaine privé mais public ou conventionné.
Ce qui implique que le droit à la liberté de penser la philosophie ne peut pas entrer en contradiction avec un autre droit tout aussi légitime, celui d’enseigner quelque chose en n’oubliant pas certains angles jugés indispensables pour former l’esprit public de la citoyenneté.

La notion de service public signifie en effet, semble-t-il, qu’il existe un certain nombre de données à apprendre et à comprendre sous des angles nécessaires, y compris lorsqu’il ne s’agit pas seulement des sciences de la matière et de la vie mais des sciences de la société et de l’esprit.

Il serait d’ailleurs curieux que l’on admette que l’enseignement de l’addition ne peut se faire sans celle de la soustraction, et négliger le fait que l’étude du positif doit se coupler avec l’étude du négatif, le bien avec celui du mal, tout en considérant que ces études s’inscrivent dans des problématiques, des polémiques, des courants de pensées.

Si la notion de respect n’est pas articulée à son contraire l’irrespect, si la civilité n’est pas étudiée avec l’incivilité, si une analyse du surgissement de ces notions et de ce qu’elles recouvrent ne voit pas le jour, quelque chose se perd, se relativise, et le contenu des notions risque de disparaître dans l’interprétation nécessaire mais point suffisante. Par exemple lorsqu’elle néglige d’aborder certains points de passages obligés, garant de la cohésion sociale du point de vue de la notion de Service Public, telles les notions de limite, de maîtrise de soi, de sanction.

Le problème n’est donc pas de se dire que de toute façon les enseignants vont nécessairement aborder tous les angles, il ne s’agit pas de mettre en doute leurs capacités, mais de garantir que l’esprit du service public soit également respecté partout. Ce qui permet d’aborder de manière équitable la matière à enseigner, tout en n’oubliant pas qu’il s’agit de préserver la société, ce qui implique certes d’enseigner les moyens cognitifs à même de la critiquer, mais aussi de la défendre, tout en pensant à en affiner les rouages.

Or il semblerait que sur ce point, comme sur d’autres d’ailleurs, il n’est pas possible de s’approprier sine die la notion de service public. Ou alors il s’agit d’aller jusqu’au bout de son désir absolu de liberté : en créant sa propre entreprise d’enseignement.

Certes il est délicat d’y arriver lorsque l’on dénie toute liberté d’entreprendre, ou en réduisant la liberté à la seule gymnastique de l’esprit. Mais ce n’est pas une raison pour se rabattre dans ce cas sur le seul service public d’enseignement en s’arrogeant le droit de permettre et d’interdire ce qu’il faut ou non enseigner. Ce point de vue ne peut être admis, du moins en régime démocratique.

Voilà pourquoi le débat doit s’amorcer sur la place publique. Tout en espérant que le Ministre ne cède pas au chantage des prérogatives de spécialistes, comme s’il fallait laisser aux militaires le soin de décider politiquement de la guerre. Or il s’agit de l’avenir de la chose publique (res publica) et la plus grande parmi toutes : celle d’enseigner et de former sans déformer, les générations futures. Même si celles-ci n’en font, ensuite, qu’à leur tête... Mais ceci est une autre histoire.

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4 Juin

Faut-il augmenter le SMIC et les dépenses de santé ?

Ce sont de mauvaises questions. Malgré leur fond pavé des meilleurs sentiments. Parce que l’on ne voit pas pourquoi il faudrait s’arrêter à 5 % d’augmentation pour le SMIC et 20 euros pour les médecins. Pourquoi pas 10, 20 % et 30, 40 euros ? Est-ce parce que Chirac a proposé 5 % de baisse d’impôts qu’il fallait absolument que Hollande le marqua à la culotte avec exactement le même pourcentage ?

Si la surenchère, digne plutôt d’un vide grenier que d’une mise aux enchères chez Drouot, devient la seule ligne de démarcation entre la droite et la gauche, il sera illusoire d’espérer que les problèmes des bas salaires et de la hausse ininterrompue de la dépense en matière de santé, sans oublier celui des retraites, soient résolus par de telles démarches faites à l’approche des élections.

Bien sûr, le fait seul de souligner ce genre de démagogie brosse tout de suite l’idée que l’on serait contre systématiquement toute hausse, ou que l’on agiterait immédiatement celle des charges qui en résulterait pour empêcher toute augmentation de pouvoir d’achat, voire que l’on se bornerait à souligner ce facteur néanmoins juste stipulant qu’il est préférable d’encourager l’effort de formation que d’écraser la grille des salaires tout de même basée pour l’essentiel sur la notion de compétence, qu’on le veuille ou non.
Pourtant il est possible de ne pas sombrer dans le « demain on rase gratis » et dans
« l’anti-social » si l’on pouvait aussi regarder les choses en face au lieu de les observer seulement de profil, c’est-à-dire selon son point de vue préféré.

Comment faire, surtout dit en peu de mots ?

Une solution, encore inusitée, peut résoudre à la fois le problème des bas revenus, des dépenses de santé, et des charges sociales : celle du salaire complet.
Qu’est ce à dire ? Ceci : l’employeur verse, en plus, au salarié, la moitié de ce qu’il paye pour lui comme charges sociales.
L’autre moitié serait divisée en deux : l’une de celle-ci disparaîtrait et l’autre financerait un compte entreprise d’épargne salariale.

Ce n’est évidemment pas tout.

Pour que le raisonnement tienne il faut en effet répondre à la question suivante :
si le salarié touche, en plus, une telle somme, qu’en est-il dans ce cas de la protection sociale et des retraites ?
La réponse est simple : le salarié serait toujours obligé de continuer à cotiser pour une sécurité sociale et une retraite, mais, et ce « mais » fait toute la différence, il pourrait choisir l’organisme qui ne serait pas, nécessairement, l’actuelle Sécurité Sociale. Et il est possible de supputer que le salarié trouve son compte, moins cher et en mieux. Comment est-ce possible ?
N’est-ce pas plutôt là l’éternelle solution « libérale » voire « néo-libérale » qui veut « accroître les inégalités » et « vampiriser » les « travailleurs » ?

Avant de se tirer le chignon et se lancer des noms d’oiseaux essayons de raisonner objectivement.

Il va de soi que s’il y avait le risque pour chacun de payer plus et d’avoir moins en prestations l’intérêt serait nul. D’ailleurs nous connaissons déjà aujourd’hui une diminution des prestations voire leur coût prohibitif (lunettes, prothèses dentaires par exemple) pour observer que la situation actuelle n’est pas tant que cela favorable à l’assuré social, et qu’il ne sert à rien d’imaginer un alourdissement des charges, voire de la CSG pour la résoudre, surtout en période de croissance molle, voire ralentie, au niveau international.

Par contre il possible d’envisager que lorsque les assurances, les mutuelles, l’actuelle Sécurité Sociale, entreront en concurrence, en France, il se passe ce qui s’est déroulé pour le téléphone: une amélioration du service et une baisse des prix.
Car le monopole –privé ou public- tue l’innovation et crée des rentes dont les bénéficiaires oublient qu’ils n’en sont pas les propriétaires, surtout lorsque le « service » qu’ils sont censés rendre est dit « public ».

Mais pour éviter les erreurs du rail anglais et la spéculation sur l’électricité californienne, il va de soi que les instances de régulation doivent rester publiques et veillent dynamiquement à ce que les cahiers des charges soient respectés, c’est-à-dire sans attendre que les catastrophes arrivent.

Bien sûr il peut être encore rétorqué qu’en admettant même que cela soit techniquement et surtout politiquement possible on voit cependant mal comment la Sécurité Sociale et le système des retraites pourraient suppléer au manque financier qui en résulterait si des millions de personnes décident de les quitter.

À cela une réponse principale : rien n’empêche que les assurances, les mutuelles, la CNAM rénovée et dorénavant en situation de concurrence, s’allient cependant sur certaines prestations pour atteindre une taille critique susceptible de faire des économies d’échelle et ainsi en faire bénéficier leurs mandataires. Un peu à l’instar de Peugeot et de Renault qui s’allient pour produire ensemble tel moteur.

De plus l’alliance peut s’établir au niveau international et permettre la constitution de grands groupes financiers, à base salariale et sous régulation publique, à même d’accroître encore plus l’assise capitalistique qui peut fort bien, par ailleurs, investir dans des fonds éthiques visant le développement du Sud.

Ainsi ferait-on une pierre trois coups : la concurrence désinhibe le secteur, l’alliance et la régulation renforcent les acteurs, l’investissement et ses bénéfices consolident la protection et le régime de retraite tout en participant au développement.

Mais la hausse ininterrompue de la dépense en matière de santé, comment faire ? Et les assurances ne vont-elles pas créer des malus et taxer les personnes âgées plus susceptibles d’être malades ?

A la seconde question il est important que l'on dise que ce point fait partie précisément du cahier des charges qui rend possible l'octroi de la concession, ce qui exclut toute augmentation discriminatoire (à charge cependant de prévoir des clauses spécifiques financées par des fonds spéciaux).

À la première question, il est également possible de répondre deux choses : il n’est pas sain de réduire les dépenses en empêchant l’accès au soin et l’on ne résoudra pas l’excès en la matière par les seuls médicaments génériques, d’autant que tous les médicaments remplaçables ne pèsent en valeur que 16 % du marché global (voir les Echos du 4 juin sur ce point). Il vaut mieux parier sur l’idée que c’est par exemple en comprenant pourquoi les Français sont les plus grands consommateurs de tranquillisants qu’il sera possible d’envisager des approches plus psychologiques et éducatives permettant de faire comprendre que la souffrance mentale vient aussi d’un refus de questionner son propre comportement.

En conclusion, il est tout de même étonnant que dans notre pays la liberté soit si passionnément vécue en matière d’expression et de mœurs, mais qu’elle soit étouffée lorsqu’il s’agit d’innovation, d’action d’entreprendre, de protection sociale. Comme si le souci de voir l’Etat paternel prévalait sur notre propre responsabilité en la matière. On confond alors nécessité d’un service public fort qui peut se faire sentir dans le cadre d’Autorités de Régulations indépendantes, et présence uniquement coercitive de l’Etat qui obligerait, interdirait, mais refuserait toujours que la Collectivité l’oblige, lui, et lui interdise à son tour, surtout lorsque l’on sait que les gaspillages se comptent en dizaines de milliards d’euros.

Il serait tout de même temps d’inventer autre chose, par exemple un nouveau système de mesures sociales qui prouverait bien que la France sait proposer universellement de nouvelles techniques fiables et justes articulant efficacité et protection pour le plus grand nombre.

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(30 Mai)


La xénophobie, la TV, ont bon dos

Par un tour de passe passe époustouflant, il aura suffi qu’une étude révèle l’influence de la télévision sur certains jeunes en matière de violence pour que ce phénomène soit immédiatement récupéré afin d' expliquer en priorité la montée du FN ; l’autre argument supposé expliquer cette dernière étant celui d’une xénophobie rampante qui aurait pu "libérer"sa parole depuis le 21 avril...

Certes des données contextuelles sont également mobilisées par ceux-là mêmes qui exploitent ces deux arguments afin de ne pas trop donner l’impression de faire entendre un seul son de cloche et aussi d’expliquer tout de même pourquoi ce sont plutôt les quartiers populaires que les quartiers aisés qui ont voté FN. Ces données sont connues puisque cela fait plus de vingt ans qu’elles sont agitées et elles ont pour nom, chômage, non intégration, milieux défavorisés.

Mais comme elles apparaissent ces temps-ci insuffisantes pour expliquer la montée des dites incivilités et du sentiment d’insécurité, les deux arguments relatifs à l’influence télévisuelle et à la parole xénophobe libérée, viennent faire office d’explications ad hoc supplémentaires.

Le dernier point en particulier semble d’ailleurs devenir si bien au fil des semaines le nouveau cheval de bataille de certains que toute tentative de réfutation semble être immédiatement cataloguée de complicité objective de la dite xénophobie.

La seule exception admise étant celle qui vient de ces mêmes quartiers populaires dont la bouffée dite xénophobe semble être comprise comme étant moins la résultante d’un fantasme d’insécurité que l’expression effective d’une souffrance bien réelle qui se dégage systématiquement des témoignages incessants en matière d’agressions et d’infamies diverses.

Ce sursaut compréhensif est néanmoins vite étouffé par le conseil latent, susurré entre les lignes, supputant aux populations blessées dans leur dignité qu'elles feraient bien d’apprendre à souffrir en comprimant toute exaspération immédiatement étiquetée de xénophobie par la pensée dominante.

Lorsque les témoignages relatent sans relâche nombre de méfaits touchant à l’intimité même des personnes, le politiquement correct actuel préfère en effet en appeler à l’acceptation silencieuse qui absout d’office puisque les supposés agresseurs sont systématiquement considérés comme des victimes de la « mondialisation néolibérale », c’est-à-dire qui ne savent pas ce qu’elles font et réagissent à la « violence symbolique » qu’elles subissent en s'en prenant à des boucs émissaires encore plus à plaindre qu’elles.

Or, en observer seulement les extravagances sera déjà jugé suspect et pourra même s’évaluer à la façon du mot d’Alain lorsque celui-ci soulignait que le seul fait de mettre en question la césure gauche droite ne pouvait que venir de quelqu’un qui n’était pas de gauche...

De même le fait de signaler comme le font tout de même certains qu’être pauvre n’est pas synonyme de criminel excusable et que se plaindre d’un certain racisme à rebours ou d’une agressivité réelle qui empêche de regarder son interlocuteur dans les yeux ou de répondre à l’insulte n’est pas nécessairement le symptôme d’une xénophobie de proximité, cette posture s’avèrera risquée. Une telle attitude sera immédiatement cataloguée, classée, étiquetée, du syndrome de racisme ordinaire.

Pourtant autant il est possible de persister à penser contre Alain que la distinction gauche/droite est moins une césure qu’un continuum entre les pôles égalité et liberté lorsqu'ils se disputent en permanence l’attraction du pôle fraternité, autant il est également possible de persister à concevoir qu’une population donnée réagit nécessairement lorsqu’elle vit un tel déséquilibre que sa perception de soi et du monde s’en trouve non seulement perturbée mais profondément chamboulée.

Pour s’en rendre compte il suffirait de se mettre dans la peau d’une population africaine ou amérindienne voyant pour la première fois des blancs venir s’installer chez elle et modifier de fond en comble sa façon de vivre : il n’est pas sûr que ces blancs soient reçus partout avec la compréhension voulue qu’ils ne cherchèrent de toute façon pas à acquérir historiquement comme chacun le sait puisque la force fut de leur côté.

La xénophobie qui doit être différenciée du racisme s’explique dans ce cas parfaitement : elle émane de populations qui veulent préserver leurs traditions et refusent qu’elles soient transformées par l’étranger.

Aujourd’hui il est possible de souligner que certaines populations de blancs vivent un monde profondément transformé dans lequel la technique et l’image deviennent des maîtresses étrangères exigeantes, tandis que les populations exclues du processus démocratique mondial source de développement et de réduction des inégalités viennent de plus en plus frapper à leurs portes.

Dans ces conditions il ne suffit pas d’en appeler à une souffrance silencieuse et au retour à une frugalité en matières de besoins ou de s’en prendre à Bush, voire à Sharon, pour enrayer le repli sur soi et le refus de l’autre.

Il s’agira plutôt d’admettre la réalité telle qu’elle est dans sa complexité et son irréversibilité en tachant d’une part de restaurer la confiance et d'affirmer les principes universels assurant le développement des personnes et des biens, et, pour ce faire, il s'agira, d’autre part, de promouvoir une réforme profonde des institutions nationales et internationales afin que le processus démocratique puisse réellement profiter à des populations qui ajoutent l’exil à l’exode interne.

Si l’on ne comprend pas cela, si l’on ne voit pas que ce sont les refus d’aider la Collectivité à éduquer ceux qui ne peuvent plus le faire dans leurs familles, de promouvoir la démocratie, réelle, partout dans le monde, d’accompagner le développement de la technique, de l’image, et de la ville, si l’on ne voit pas que ce sont ces facteurs là qui sont les causes majeures des mouvements de repli sur soi en Europe, alors il ne faudra pas s’étonner de voir les populismes prendre de plus en plus d’ampleur.

Et il ne servira à rien de faire comme ce berger qui à force de crier au loup pour s’amuser se trouva bien seul lorsque celui-ci apparut pour de bon.

Il semble bien que nous en sommes là en France, lorsque le brouillard des idées reçues et du prêt à penser se dissipe par inadvertance avant de s’épaissir de plus belle lorsque le sursaut de conscience objective dévoile d’un seul coup l’immensité de la tâche à accomplir pour sortir l’Europe de l’ornière dans laquelle elle s’enfonce pourtant et avec son propre consentement, entraînant le monde entier dans sa chute.

(11 Mai)

Le « vrai » dialogue et les sifflets contre La Marseillaise

Lorsque les sifflets, principalement issus des bancs corses, retentirent au moment où était joué l’hymne national et avant que le coup d’envoi de la Coupe de France de football entre Bastia et Lorient samedi 11 mai ne soit donné, on vit le Président Jacques Chirac se mettre en colère et quitter la tribune. Cette réaction était justifiée.

Mais avant de condamner les fautifs peut-être faudrait-il revoir la scène de la manière la plus objective qui soit car il ne suffit pas de montrer les Corses pour comprendre que les sifflets soulignaient aussi ce manque de dialogue social –et aussi national- si précieux pour le nouveau Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin.

Qu’on en juge : lorsque les deux équipes se présentèrent sur mon écran TV un peu à la façon Coupe du Monde –c’était une finale- je sentis, sourdement, quelques secondes avant que les sifflets fusent, que le pouls de la foule des supporters désirait d’abord se reconnaître dans la particularité de « pays ». Il aurait été alors bon que l’orchestre joue sinon l’hymne de Bretagne et de la Corse du moins celui de Bastia et de Lorient, en supposant qu’il y en eût d’existant.

Ensuite, La Marseillaise aurait été joué. Ce qui permettait de mettre en accord de phase les notions de pays et de nation au lieu de les opposer comme il est coutume de le faire toujours en France, les Jacobins n’ayant rien inventé.
Qu’il soit au minimum regrettable que La Marseillaise ait été sifflé une seconde fois est un fait têtu. Mais s’en tenir à la stricte dénonciation qui de surcroît y amalgamerait les sifflets d’Algérie-France serait une erreur d’analyse. Car ces derniers suintaient la souffrance d’une génération désintégrée. Tandis que les sifflets de Bastia-Lorient résonnaient d’agacement et d’impatience.
Devant la suffisance d’Etat.

Pourtant une chance inouïe, une « fenêtre » semble apparaître au croisement du pire et du fatal, comme si le destin donnait à nouveau une possibilité à la France de se ressaisir au delà des déchirement séculaires et des clivages permanents.

Un vrai dialogue se situerait à trois niveaux.

Tout d’abord le dialogue national.

Les régions et les pays pourraient renouer avec leur passé illustre et mieux fonder leur attachement à la patrie des droits de l’homme et du citoyen en appliquant le mieux qui soit le principe suivant.
Les Parlements régionaux s’occupent du local, mais aussi du national et le Parlement national prend en charge leurs résolutions finales pour en faire des lois, tout en s’occupant de l’Europe et du monde.
La Corse et la Bretagne penseraient par exemple à ce qu’il y a de mieux pour elles et le proposeraient au Parlement National, mais aussi soulageraient le travail de celui-ci, tourné de plus en plus vers l’Europe et le monde, en partageant avec les autres régions de France la réflexion pour vivre mieux partout dans la Nation.

Le second dialogue concernerait l’international.

Car si l’on veut comprendre la poussée xénophobe balayant l’Europe du Nord il s’agit de mettre sur pied des institutions qui renforcent la solidarité mondiale afin que la pauvreté recule et que les flux migratoires ne soient pas imposés par la nécessité mais désirés de part et d’autre.
Seule la démocratie permet un solide développement puisque le droit de produire et de consommer crée des richesses.
Mais pour y arriver cela implique de réformer en profondeur l’Onu, de négocier au sein de l’OMC la transparence sur la composition des produits et les conditions sociales de leur fabrication, de convaincre les flux financiers, uniquement spéculatifs, de participer aux efforts de la Banque mondiale, de l’OMS et de l’Unesco réformées. Plus la démocratie sera forte plus la croissance mondiale pourra décoller et la pauvreté reculer. Le FMI devra dans ce cas être de plus en plus tourné vers un accompagnement des réformes et non pas vers le seul assainissement comptable.

Le troisième tableau est social.

Les élites dirigeantes doivent démontrer à l’opinion que la chose publique, la res publica, sera d’autant plus « au service du peuple » qu’elle s’occupera beaucoup plus de justice de protection de solidarité et beaucoup moins de clivage partisan. Jacques Chirac a été élu avec plus de 80 % de votants de droite et de gauche, mais aussi de sans étiquettes.
La stratégie qui pourrait aider en ce sens serait de considérer que tout humain est de droite et de gauche à la fois. Même le plus pauvre.
Il est de droite lorsqu'il tente de pousser ses intérêts, motivations, passions, le plus loin possible. Et il est de gauche lorsqu'il espère en des jours meilleurs pour l'ensemble de l'humanité. Leur conflit est en nous. Perpétuellement. C’est cela d’ailleurs la seule vraie guerre qui vaille la peine de mener.
Aussi Noël, Lionel, Arlette, déploient tout aussi bien leur vouloir jusqu’au bout de leur pouvoir que François, Jacques, Alain...
Et pourtant tous exigent paix et justice dans le monde. Ce qui n’est pas contradictoire.
Si ce débat n’est pas déclenché, il y aura de plus en plus cette démagogie qui fera passer le moindre dysfonctionnement, la moindre injustice ou excès de puissance comme "produit" du capitalisme néo ou ultra selon la marque de fabrique. Alors qu'il y a toujours eu du conflit, des tricheurs, l'appât du gain pour plaire ou par avarice, et,toujours, le besoin permanent de faire mieux.

Il est crucial de donner au citoyen à la fois du confort et de la responsabilité. Que l'on cesse de l'infantiliser en pensant qu'un plus de liberté voudra dire un plus de sauvagerie : c'est ce que la pensée rigoriste disait autrefois sur le « libre arbitre », sur la vie « livrée à elle-même »…
Le rôle de l’Etat se doit d’orienter plutôt les sommes des impôts directs et indirects vers des tâches que la société civile, la Nation, a, en majorité, du mal à faire elle-même la justice la protection la solidarité.

La protection doit devenir une « top priorité » comme cela se disait dans les émissions branchées avant Loft Story. Le sentiment d’insécurité est loin d’être aussi fantasmatique dans certaines zones dites « grises » ni dans le regard inquiet de certains conducteurs de métro de bus ou de train, surtout lorsque l’on est femme.

Comment faire ? En redonnant confiance. Déjà par une formidable campagne de communication traquant l'incivilité, la mettant en scène comme l'on sait si bien le faire pour le sida ou la prévention routière. Ensuite en envoyant les plus récalcitrants des jeunes délinquants en centres de vie à projet personnalisé. Enfin en réorganisant les filières d’enseignement et de formation, en orientant vers des métiers revalorisés ceux qui ne supportent plus la généralité de la filière unique.
De même la solidarité doit devenir une priorité.
Car la solitude et le déracinement gagnent du terrain et s'accompagnent d’un degré fort d’impréparation mentale touchant une partie croissante de la population effrayée devant les vagues incessantes d’images manipulées pour le meilleur et pour le pire et s'affichant de plus en plus comme quasi réalité.

Pour mener à bien cette réorientation il faut de l’argent.

Ce qui implique de préférer la concurrence au monopole car les rentrées d'impôts seront meilleures. Il vaut mieux en effet que les entreprises fassent des bénéfices et payent des impôts plutôt qu'elles restent uniquement publiques et déficitaires.
Il vaut mieux le statut de France Télécom qui rapporte des sous à la collectivité que la SNCF qui en coûte de plus en plus. Ouvrir le capital ? Oui! pour de meilleurs services publics.

L’erreur des Britanniques et des Américains avec la privatisation du rail et de l’électricité aura été de ne pas comprendre que l’on ne peut pas privatiser l’arbitre, -l’instance de régulation- même si pour le rail anglais il ne faut pas oublier que lorsque Thatcher le privatisa en 1980 il avait déjà trente ans de retard en matière de maintenance...

Depuis que France Télécom n’a plus le monopole, personne ne peut dire que cela nuit, malgré les achats impétueux, et même si certaines catégories se plaignent, et sûrement à juste titre, des cadences. Mais ceci relève du combat syndical classique et ne dépend pas du statut juridique de l'entreprise. Et elles pourraient d'ailleurs fort bien exiger des compensations en demandant plus d'embauches, il y a actuellement pénurie d'ingénieurs et d'ouvriers qualifiés en électronique…, dans le bâtiment.

EDF, GDF, et la SNCF pourraient en faire autant : décider d'apporter le plus d'argent possible à la collectivité en devenant société anonyme, en payant donc des impôts nécessaires pour accroître la solidarité et la protection.

Seulement la difficulté de la pensée syndicale à la française, hormis les actuels efforts de la CFDT, et, paradoxalement de SUD, (paradoxalement parce que son discours est plus radical, mais plus pragmatique) consiste à refuser, d’emblée, de considérer le patronat comme un partenaire. La CGT voit par exemple seulement en lui un interlocuteur. Or c’est justement ici qu’il s’agirait d’entamer un débat essentiel afin que les salariés soient parties prenantes dans la décision économique. Tout en sachant néanmoins que la fonction syndicale reste distincte de la fonction gestionnaire.

Il n'est en effet pas question de confondre les genres : sous couvert de productivité et d'augmentation des dividendes les salariés pourraient être la cause même de leur propre surmenage...

Le rôle de l’Etat en France serait donc de veiller à ce que ces trois dialogues, national, international, social, se déroulent dans les meilleures conditions.
Pour la première fois depuis longtemps un Président en France est élu sur un mandat largement républicain. A lui de saisir cette chance et faire en sorte que ces dialogues débouchent sur un renforcement de la France. N’oublions pas aussi que la planète a de plus en plus besoin d’elle. Pour les universaliser.

(1er Mai)

Instant de vérité et souffle coupé, place de la Nation, 17 heures.

Une sensation d'irréalité individualisée entrecroise les pancartes aux slogans très "bouge de là" mais parfois trop taillés aux dimensions du bon mot médiatique pour caméras TV balayant la foule refoulant désespérément le cauchemar venu du fond des non dits aux détours des rues cramées. Le cauchemar est néanmoins fait d'une suie qui tient.

Et le lièvre s'est réveillé trop tard, beaucoup trop star, la tortue (qui se prend pour un auroch) approche de la ligne d'arrivée, de l'instant de vérité.

Peut-être arrivera-t-il à la rattraper ? Sans doute. Malgré les rumeurs et autres humeurs. Mais à la prochaine course, s'il lambine autant, s'il croit encore qu'il n'y a pas le feu et qu'il est préférable de discuter sur le sexe des anges au fond des lofts academy plutôt que réformer la France pour la rendre plus forte et donc encore plus agréable à vivre pour tous, son avenir de civet n'est pas loin.

(27 Avril)

Mea-culpa

J'ai passé la soirée du 1er tour à Djerba, près de Médoun, étonné et amer d'observer que j'ai sous-estimé le degré de rejet des solutions mièvres et immobiles. La victoire des socialistes en 1997, et leur conquête de Paris et de Lyon m'ont fait oublier qu'il ne suffit pas de dire qu'ils sont seulement là grâce aux triangulaires imposées par le FN alors que ce dernier peut se permettre ce petit jeu parce que l'incapacité de la gauche et de la droite à répondre aux préoccupations et aux défis du temps le fait gonfler...

Néanmoins je ne crois pas que cela soit en le diabolisant que son attraction sera stoppée pour autant. Et il n'est pas vrai que la gauche soit le meilleur rempart contre lui, surtout l'extrême gauche dont les thèses au contraire alimentent le FN, comme ce fut le cas en 1933 en Allemagne où les massacres par millions en Russie firent très peur et permirent la montée de Hitler.

Par ailleurs le fait que l'on se demande pourquoi dans telle ou telle contrée un tel vote soit possible alors qu'il n'y a pas de problèmes d'immigration et/ou de délinquance, revient à réduire le vote à des élections nationales au rang de réaction municipale donc locale alors que cela n'a rien à voir puisque chaque citoyen réagit aussi comme membre d'une communauté de destin et qui ici en l'occurrence s'énerve sur l'insécurité, le centralisme bruxellois, et plus généralement les affres de la société moderne aux médias perturbants.

En fait c'est toute une analyse sur l'impact non pas de la "société de consommation" mais de la société technique et urbaine, ne serait-ce déjà pour comprendre la furie d'une jeunesse dont les aspects immigrés et non formés n'expliquent pas tout. Un tout qu'il faudrait mieux déjà percevoir dans le phénomène Loft Story pour commencer.

J'en dirai un peu plus la prochaine fois, et j'aborderai également la dérive national-populiste actuelle. J'ajouterai seulement que Jospin a peut-être également perdu parce qu'il a commencé sa campagne au centre gauche et de façon alambiquée ("ce n'est pas un programme socialiste mais moderne") et qu'il a fini à l'extrême-gauche en vrai-faux quatrième candidat trotskiste proposant tout et son contraire. Résultat : deux à trois pour cent centre gauche sont partis rejoindre Bayrou et sa claque. C'est là toute l'ambiguïté socialiste : à force d'osciller entre le parti de la réforme et le parti de la conservation Jospin a perdu sur les deux tableaux.

(13 Avril)

A nouveau... Arafat-Sharon.... et la paix : la responsabilité de Chirac.

Syndrôme de la mémoire courte : alors que Clinton pressait Arafat de signer les accords finaux de Camp David et de renoncer à sa principale revendication, le retour immédiat et total des quatre millions d'émigrés palestiniens en Israël même, Chirac conseilla à Arafat, en visite à Paris en décembre 2000, de ne pas signer, supputant par là qu'il pourrait obtenir plus...

Comment se fait-il que personne de censé ne se lève pour dire que la principale pierre d'achoppement c'est celle-ci puisque toutes les autres sont négociables ? Et qu'au fond Arafat en refusant l'existence d'Israël (puisque cette revendication revient à cela) arme les extrémistes des deux bords, tout en empêchant à son peuple l'entrée dans la modernité amorcée par les accords d'Oslo ?

Decidément Targuieff a de plus en plus raison : le palestinien "victimisé" sert en France de prétexte supplémentaire pour vivre non pas dans l'irrationnel mais l'antirationnel qui ces temps-ci fait bombance en récusant l'existence du crash sur le Pentagone. Bientôt la rumeur de Jénine : les combattants islamistes transformés en doux promeneurs massacrés par les méchants israéliens venus exprès pour les tuer. Quelle différence entre le totalitarisme des kamikases et les tués de l'armée israélienne ? Le fait que le premier tue pour imposer sa vision unilatérale du monde, la seconde tue pour s'en protéger, du moins principalement, puisque personne n'est parfait.

Mais un sursaut de rationalité est devenue impossible visiblement et cette cécité alimente la bassesse des attentats antijuifs. Voilà où nous en sommes : c'est à vomir et que l'on ne vienne pas dire que tout cela "est la faute de Sharon" alors que Barak, bien avant l'arrivée au pouvoir de ce dernier, avait fait tout son possible pour créer les prémisses d'une paix durable.


(2 Avril)

Arafat-Sharon.... et la paix (retouche de l'article du 25 mars ci-dessous).

Il semble bien, et de plus en plus, que la première pierre d'achoppement soit le retour des 3,5 millions palestiniens en Israël même. Or si l’on veut la paix il n’est pas possible de placer le problème du retour au même niveau que la constitution de l'Etat palestinien. Ce qui implique néanmoins pour Israël d'ouvrir, dès maintenant, la discussion sur ce thème, du moins en termes d'indemnisations et de regroupement des familles.

Concernant maintenant les autres points en suspens comme les implantations et Jérusalem, il ne faut pas oublier, s’agissant du premier point, que ce ne sont pas de simples «colonies» mais des prises de guerre, celle de 1967, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, et, ensuite, interdit de faire fi de ses habitants, juifs, dûment installés depuis 35 ans, et qu’il serait tout autant barbare d’expulser et de toute façon quasi impossible à faire, du moins pacifiquement, tant la détermination des implantés est dense et intense.

Néanmoins il est urgent de négocier avec eux le fait qu’ils doivent payer une taxe foncière et certains impôts locaux à l'Administration palestinienne, et que des palestiniens puissent également s'y installer.
Enfin sur Jérusalem un consensus entre modérés des deux bords semble admettre qu'elle peut devenir simultanément la capitale des deux Etats.

Mais il est exact que tout ceci ne suffit pas du point de vue de la viabilité du futur Etat palestinien, en particulier sur le plan économique. Rappelons que durant la brève accalmie qui a accompagné les accords d’Oslo, les exportations palestiniennes, en particulier d’agrumes, avaient été lourdement taxées par Israël. Or une bonne amorce de développement basé sur des échanges justes pèserait beaucoup dans la balance.

En tout cas si personne n'accepte pas cette politique des petits pas, inaugurée par Sadate et Begin, il sera démontré que les dirigeants des deux parties préfère la fonction de chef de guerre à celle de chef d’Etat, et qu'ils signent des blancs seings aux divers extrémistes de leur propre camp dont les actions, loin d'apporter la paix, renforcent, de jour en jour, d’une part les assassins de Rabin et leurs illusions du retour à la Palestine biblique et d’autre part les partisans du Hamas qui considèrent la libération des territoires occupés comme une première étape.

La paix n’est pas une reddition, elle se gagne à deux.

N'en déplaise à Bové.

(25 mars) Défense du concept de développement durable

Edgar Morin se met donc à la dernière mode dans le Monde du 25 mars : il propose d'écarter l'idée de développement trop liée selon lui à la notion de croissance quantitative pour lui préférer celle d'"anthropolitique" soulignant mieux la nécessité de penser en terme de "société-monde" et donc de "civilisation". Sauf que je me demande si cette mise à l'écart du terme de "développement" -tout de même bien plus parlant que celui proposé par Morin et expliquant de lui-même qu'un développement n'est pas séparable d'un déploiement sinon harmonieux du moins équilibré de ses composants (J. Piaget et J.Nuttin l'emploient dans cette acception) ne se met pas au diapason de cette résurgence du mot d'ordre " croissance zéro" sous le vocable de "l'antidéveloppement".
Ce remake aurait alors pour objet de déconseiller aux pays "émergents" d'atteindre notre niveau de développement à nous méchants et impériaux occidentaux et de rester plutôt dans une espèce de frugalité respectueuse de "Terre-Patrie".

Or je ne vois pas pourquoi ne serait-il pas possible de développer la planète sous le principe d' une vie meilleure c'est-à-dire faisant à la fois attention aux devenirs des humains et de tout ce qui est vivant. Par exemple en substituant progressivement l'hydrogène au pétrole, le thorium à l'uranium en matière nucléaire pour diminuer la difficulté d'en éliminer les déchets. Et aussi en acceptant que les mégapoles du Sud puisse en effet atteindre un stade techno-urbain suffisant et un environnement institutionnel satisfaisant pour développer les acquis, tout de même, de la civilisation européenne -nourrie en effet d'autres civilisations- ce qui permettrait de donner un contenu positif au mot" humain" que des régulations nouvelles au niveau mondial développerait vers l'affinement plutôt que vers le pire.

Mais si Morin préfère la frugalité, libre à lui, à partir du moment cependant où elle ne devient pas la nouvelle utopie obligatoire imposée à tous, surtout aux gens du Sud, qui, les pauvres ! ne savent pas que nous vivons l'enfer dans les pays développés. Développement qui a bien plus à voir -comme le soulignait récemment le président Sénégalais-avec la capacité, conflictuelle, d'articuler innovation et protection, que "pillage". Car il est bien facile d'oublier que la gabegie dans laquelle se noie actuellement la plupart des pays du Sud en difficulté, par exemple en Afrique, découle bien plus de la dérive totalitaire d'essence "occidentale" importée que fut le socialisme soviétique, qu'aux diktats des "gnomes" du FMI et de la Banque Mondiale. Mais, chut! la nouvelle pensée hégémonique qui refait son fonds de commerce du fait des méandres et autres manques de la politique mondiale a besoin de dire le contraire. Dommage que Morin s'en soit fait le porte-voix pour se donner bonne conscience. Alors que le Sud n'a que faire de cette pitié de nanti : il veut du développement !

Terrorisme et politique (23 mars, retouché le 25 mars)


Connaissez-vous Fortuyn ? Pim Fortuyn est hollandais et avec sa plate forme anti-immigration de son parti " Livable Rotterdam " il a gagné 17 sièges sur les 45 que compte cette municipalité. Avez-vous entendu parler de Fortuyn dans la presse française ? Pourtant Fortuyn, 54 ans, est, écrit Time magazine (18 mars, p 43), un ancien universitaire, un sociologue, et il est homosexuel...

Quoi ????? Un "gay" ne serait donc pas automatiquement de gauche et pro-sans papiers ? Impossible ! Et pourtant si ! sauf que personne ne connaît Fortuyn en France et pendant ce temps là ce monsieur peut selon les sondages espérer 18 des 150 sièges du parlement national aux prochaines élections législatives du 15 Mai...

Mais citons Time : " In 1997 he published a book calling Islam " a backward culture," saying : " For Muslims, as a homosexual, I am less than a pig. I am proud that in the Netherlands I can some out for my homosexuality, and I'd like to keep it that way, thank you very much". In the campain, Fortuyn called for a total freeze on immigration to the Netherlands,which he says is "full". He also said the Dutch should scrap the clause in the constitution that bans discrimination. "

Pourquoi parler de ce type ? Parce que les grandes et belles âmes se pâment à Paname en vociférant au salon du Livre sur Berlusconi -qui a profité des divisions et de l'incurie de la gauche italienne- mais elles ne pipent pas un mot quand un démagogue hollandais s'empare des mêmes arguments ou à peu près sur l'Islam y voyant seulement l'islam-isme et non pas des islams dont certains, confrontés à la Modernité, sont bien obligés de séparer peu à peu dans leur tête religion et société, Dieu et condition de la femme. Le fait que des immams en France comme Amar Saïdi à Rouen et Soheib Bencheick à Marseille (le Figaro du 25 mars) travaillent en ce sens est de bonne augure.

Mais à Paris, et aussi en Italie, il est préférable de s'en tenir aux poncifs, et, lorsqu'une exception dérange la règle (gay=progrès), mieux vaut l'oublier...

Ainsi Berlusconi, après Haider, sera le bouc émissaire. Et des hommes de l'ombre viendront flinguer un de ses conseillers. En cherchant précisément à légitimer leur acte par le climat délétère qu'entretiennent certains non seulement sur Berlusconi mais en fait sur la société européenne en général, et l'Amérique en particulier.

D'un côté donc les bons et les purs, les défenseurs du prolétariat mondial contre le "néolibéralisme" contre la misère, le conflit entre les hommes... De l'autre côté les salops qu'il faut abattre avec le même pistolet qui a déjà tué un autre conseiller, arme du prolétariat elle aussi.

Pourtant le président sénégalais Abdoulaye Wade a déclaré lors de la conférence de Monterrey note Le Monde (du 23 mars) : " On ne connaît nulle part dans le monde un pays qui ait réussi par l'aide et la dette (...) C'est le secteur privé qui a développé l'Europe, les Etats-Unis et les pays asiatiques. (...)".

Bien sûr il peut être rétorqué que ces pays ont pu se développer grâce au pillage des Amériques effectué à partir du 15ème siècle. Sauf que l'or espagnol ne persista pas très longtemps et fut même une des causes de l'assoupissement de cette glorieuse nation. L'or fut dilapidé dans l'achat d'étoffes et d'épices rares venues d'Orient, afin de parader dans des fêtes monstrueuses. Et ce fut tout.

En France Versailles draina toute la richesse, intérieure, rassemblée par les nobles pour asseoir la monarchie absolue, tandis que les disettes persistaient et éclataient tous les dix ans ( la dernière juste avant 1789) et que l'on mourrait de faim en Angleterre en Irlande en Ecosse au 19ème siècle, ce qui créa le vaste courant d'immigration que l'on sait vers les USA alors que s'accélérait la première révolution industrielle. La création de richesses fut là aussi interne et fut exportée ensuite, ce qui accentua le commerce mondial, et non l'inverse, comme le crut Lénine lorsqu'il considéra que l'impérialisme était l'âme du capitalisme alors qu'il en est seulement le complément.

Cette erreur de Lénine, que l'on retrouve aujourd'hui amplifiée dans les analyses anti libérales actuelles, découle en fait d'un raisonnement plus faux encore : celui prétendant que c'est le commerce, l'argent, la propriété, qui crée l'appétit de puissance dont l'impérialisme serait "le stade suprême".

Il suffirait de supprimer le marché, l'argent, le développement, pour éteindre l'appétit, l'envie, la volonté de pouvoir. Puisque l'homme est naturellement bon, c'est un décret ; la faute, le mal, l'envie, ne sont que les enfants monstrueux de la société, de la propriété privée, la division des tâches, etc...Et le moindre problème, bobo, conflit, pleurs, heurts, tricherie, malheur, mensonge, Enron, le rail anglais, Bush, Berlusconi et l'article 18 du Code du Travail italien, Sharon aussi -à Beyrouth, tout ceci, et plus encore, en est l'illustration même, portée par un Occident arrogant qui, d'ailleurs, là-bas, à NY, a "eu ce qu'il méritait " et sans doute est-ce un coup de la CIA, du Mossad, des deux à la fois.

Voilà le terreau actuel du terrorisme en politique et il est en plein essor.

Il profite des erreurs stratégiques et tactique d'une classe politique et intellectuelle européenne à bout de souffle, grevée de clientélisme et d'immobilisme volontaire, croyant d'un côté qu'il suffit d'être de gauche pour devenir pur, croyant de l'autre côté qu'il suffit d'être libéral pour limiter les effets pervers de la division sociale et internationale du travail qui ne peuvent être laissés ni au seul marché ni à des tribunaux peu préparés à décider de ce qu'il en est en économie mais à la concertation paritaire capable de prévoir en amont lorsque cela va mal et de préparer en aval les reclassements nécessaires.

Seulement il faudrait que d'un côté les soi-disants gens de gauche pensent réellement au bonheur de leurs mandants en acceptant ce que veut dire le mot "entreprise" et il faudrait que les soi-disants gens de droite sachent qu'ils n'arriveront à rien sans intégrer vraiment les salariés dans l'avenir du capital. C'est-à-dire pas seulement comme actionnaires passifs.

C'est d'ailleurs parce que le capital saura s'associer au travail qu'il sera possible d'éviter la fuite en avant technocratique comme il a été vu dernièrement à France Télécom, la direction étant incapable de comprendre qu'il ne servait à rien de se lancer dans le WAP alors que son design internet était en dessous ce que l'on avait déjà en ordinateur portable : or, comme le marché du WAP était tourné essentiellement en direction des professionnels,il va de soi que ceux-ci préféraient plutôt l'aspect coloré et ludique de leur ordinateur portable que le noir et blanc microscopique du WAP qui rappelait en plus le minitel...

JC Casanova, directeur de la revue Commentaires, rappelait récemment dans le Monde le mot d'Alain stipulant que le fait de remettre en cause la coupure gauche/droite permettait d'observer que seule une personne qui n'était pas de gauche pouvait le dire. Sauf qu'Alain n'a pas nécessairement raison parce que ce type de raisonnement ferme automatiquement toute critique et repose sur sa seule dénégation alors qu'il est possible d'avancer qu'il ne suffit pas d'être de gauche, surtout après le Goulag, qu'il n'est pas possible d'être seulement de droite, si l'on veut, réellement, articuler, malgré leur conflit, liberté et égalité.

Or confondre liberté et jungle, confondre égalité avec égalitarisme, c'est promouvoir un monde dans lequel rien ne compte puisqu'il suffit d'exister pour être, les nouveaux esclaves étant ceux qui ne peuvent pas s'empêcher de travailler, de créer pour se sentir en paix, tandis que les nouveaux seigneurs disserteront d'un côté sur la meilleure manière d'interpréter ce qu'a vraiment dit Marx. Et de l'autre sur la meilleure façon d'interpréter ce qu'à vraiment dit le président de la banque centrale américaine.

Et le terrorisme contemporain en marche, qu'il soit d'origine religieuse ou léniniste, se sert de ces manques, de ces faiblesses théoriques et pratiques, pour créer une nouvelle légitimité, propice à la future prise de pouvoir d'une nouvelle race de seigneurs parasitaires, se servant de l'Etat comme ruche, en attente d'une Russie à abattre, vaches riches en viandes : la France, l'Italie...pour continuer à faire peur en se servant de la moindre tentative de réformes, en agitant les gabegies diverses, cachant que le rail anglais avait déjà 30 ans de retard lorsque Thatcher le privatisa en 1980, vendant aussi l'instance de régulation, et ce fut l'erreur.

Puisque les hommes restent des hommes, surtout lorsqu'ils sont sans limites. Le pire ne peut pas être tout le temps évité et alimente aujourd'hui les demandes en justification du terrorisme pour vouer aux gémonies le marché, et se présenter comme avant garde permettant aux "opprimés" -ceux surtout au chaud sur le déficit public- de se maintenir en tête des gondoles, via Ardisson et les Guignols.

Il y aurait donc un Etat, un Kapital, mécréants, porteurs de tous les maux, auteurs de "génocide" dit sans rire Castro à Monterrey alors que son peuple est réduit à l'état de zombis sauvés des os parce qu'ils se vendent aux touristes houelbecquisés ; il y aurait donc le mal parfait, qui, dépassé, supprimé, permettra, sûr, la création d'un état nouveau, prolétarien, pur et parfait, où chacun deviendra beau, bon, géniaaal.

Toute cette litanie refait donc surface. Pour le plus grand malheur des peuples.

Car il va de soi que si l'on appliquait, une seule seconde, toutes ces théories fumeuses , soi-disant du côté des "travailleurs", le Sahara serait bientôt obligé d'importer du sable.

Il ne suffit d'ailleurs pas de dire qu'en Russie le communisme a échoué parce qu'il n'existait pas en Europe et dans le monde pour prouver le contraire. C'est bien plutôt parce que les "travailleurs" étaient encore plus mis sous le boisseau qu'à l'époque du capitalisme triomphant et que des parvenus avaient uniquement comme bagages et savoir- faire la carte du "Parti" que le peuple russe connut désaffections, trahisons, et mise à mort à grande échelle.

Il ne faut tout de même pas oublier que dans la "grande alliance ouvrier-paysan" tous furent toujours les dindons de la farce et surtout ces derniers: les "travailleurs" noyautés par les soi-disants "révolutionnaires professionnels" devaient fabriquer des tracteurs par exemple et en échange les paysans apportaient des victuailles : mais les paysans ne voyaient rien venir...Pourquoi ?

Parce que dans les entreprises la cellule du "Parti" désorganisait tout, que l'on discutait à n'en plus finir du qui-fait-quoi, que les rancoeurs, jalousies, se donnaient à coeur joie pour mettre à l'écart, mettre à mort les techniciens, les ouvriers qualifiés, les ingénieurs ; et, pour y échapper, leur fuite fut telle que le "Parti" dut lancer un appel au secours à l'étranger pour embaucher des "techniciens-camarades-étrangers" ce que l'on appela les "coopérants" dans d'autres contrées, dans le Tiers Monde, qui a bien plus souffert des dizaines d'années passées sous le communisme importé que sous le colonialisme malgré le mépris de celui-ci, c'est un triste constat. La dérive africaine s'explique aussi et surtout par là et non pas seulement par la spéculation sur les matières premières.

Pendant ce temps les paysans ne voyaient donc toujours rien venir : ils décidèrent alors de ne plus apporter de nourriture : les nouveaux parasites parlant "au nom des travailleurs" décrétèrent qu'ils étaient contre-révolutionnaires et en tuèrent des millions.

Et vous savez pourquoi les marins de Constradt se sont révoltés ? Alors qu'ils avaient été toujours en première ligne ? Parce qu'un décret voulait nationaliser leur petit cabanon qu'ils avaient pour aller pêcher le dimanche ! Parce qu'il fallait que tout le monde travaille, tous les jours ! pour "rattraper le capitalisme", pour " construire le socialisme" sans se douter que "l'homme nouveau" ne se construit pas à coup de cravache, en lui supprimant son bien, en croyant qu'il suffirait de le nourrir le loger pour qu'il se satisfasse d'une vie frugale où l'on vendrait tout à prix coûtant (dumping) pendant que tout le monde gagnerait la même chose, peu importe le travail, et peu importe si l'on travaille.

Cette "mystique" de l'homme nouveau qui se contenterait de peu, qui détruirait en son sein le pouvoir ou qui le confierait à une sociocratie de purs, a en réalité fait bien plus de morts que l'hégémonisme occidental.

Or au lieu de se dire que le combat pour l'amélioration des choses est permanente et que même dans le meilleur des mondes possibles il y aura toujours des tricheurs et des super menteurs, nos nouveaux prêtres, ces néo-petits bourgeois -parce qu'ils sont essentiellement issue des services publics détournés pour propre compte- en appellent à la mort, eux qui se prétendent pourtant avec les "travailleurs" alors qu'ils veulent seulement imposer leur façon de vivre peinarde tout en prônant la frugalité, que certains d'entre-eux appliquent, certes, mais ce n'est pas une raison pour obliger les autres.

Seulement cette nouvelle petite bourgeoisie qui se cache derrière le mot travailleur pour mieux le tondre, veut continuer à profiter des errements grandissants de l'élite actuelle issue du scientisme et de la société politique traditionnelle soucieuse, elle, de préserver son hégémonie sur une conception étriquée centralisée masculine du pouvoir qui préfère, et coûte que coûte, continuer plutôt ses diverses bêtises sur la non réforme en laissant libre cours en secret à ses appétits de puissance et son refus obstiné des contre-pouvoirs.

Pour la grande joie du terrorisme, bras armé, vitrine officieuse, de cette nouvelle petite bourgeoisie nihiliste, très heureuse ces temps-ci en politique.

Déluge des images et jeunes cerveaux (22 mars)


Le récent fait divers mettant en cause deux jeunes adolescentes s’imaginant dans «Scream 3» ou dans «Tueurs nés» alimente le débat lancé par la ministre déléguée à la famille et à l’enfance, Ségolène Royal, sur «la maltraitance audiovisuelle» : les images ont-elles une influence sur nos jeunes cerveaux ? Il semble bien, au vu de diverses études, qu’une réponse stricte par oui ou par non n’est pas si simple. Chaque cas est singulier (l’une des deux adolescentes était suivie institutionnellement).

Mais les fractures sociales et psychologiques n’expliquent pas tout. Car «la perte des repères» qui en découlerait est un facteur important mais guère suffisant lorsqu’il n’y a pas eu de repères ou si peu.
Il est possible en effet de voir émerger dans nos sociétés techno-urbaines certains cas de figure où il s’agit moins d’ une destruction-effacement des valeurs que leur absence, béante. Dans ces conditions la conscience se réduit à l’instinct et celui-ci se calibre uniquement sur le principe de plaisir.

Or, plus celui est en manque, y compris en manque de reconnaissance sociale, plus il dénie au principe de réalité de le freiner et dans ce cas tout lui est bon pour le passage à l’acte. Plus encore, si celui-ci fait seul office d’existence alors la destruction d’autrui ou de ses biens devient la seule preuve empirique de la réalité d’être (Hegel le disait déjà dans sa philosophie du Droit). Surtout lorsque ce manque de repères mais aussi l’éclosion de diverses frustrations sont seulement compensés par un trop plein d’images dont le contenu excite, pousse à s’y croire, et à en prolonger l’illusion dans le réel pour y perpétuer sans fin la sensation de plaisir.

Ceci ouvre certes le débat sur l’influence des médias. Et déjà sur cette capacité à rendre visible des mondes autrefois cachés ou juste racontés par les troubadours et les voyageurs au retour des fêtes fabuleuses et des voyages fantastiques et à l’ombre des légendes millénaires aux mille monstres et autres fées enchanteresses.
Cette réflexion, nécessaire, ne doit pas cependant occulter qu’il n’est pas nouveau et que la répression n’est pas la seule réponse possible, même si le balancier de la non interdiction a été si loin qu’en revenant à toute allure de l’autre côté il engendre aujourd’hui son contraire : une diabolisation des images.

Mais il faut tout d’abord rappeler que le débat sur leur impact persiste dans sa version contemporaine depuis les années 60 et au fond a toujours existé, qu’il s’agisse du refus des images dans les religions juives et musulmanes ou de la querelle des Images lancée par les Iconoclastes chrétiens byzantins (VIIIe-IXe s.) jugeant «idolâtrique» toute représentation figurée du religieux. On ne doit pas oublier ensuite que la libéralisation quasi complète des images est récente et qu’il n’y a pas si longtemps au cinéma un corps un peu trop dénudé pouvait faire scandale.

Que peut-on en retenir de cette querelle en fait permanente qui pourrait nous intéresser aujourd’hui pour mieux cerner les contours d’une régulation nécessaire sans sombrer dans l’excès du retour en arrière ? Peut-être ceci : l’analyse du côté obscur de l’image consiste déjà à remarquer qu’elle fixe, arrête, le flux de l’imagination qui certes crée des représentations dans le cerveau mais ne s’y polarise pas alors qu’en les voyant réellement à l’extérieur l’oeil interne de la conscience peut s’y ancrer et de là drainer toute l’énergie dans une tension, une attention, surréelle, qui réduit par exemple les aspects d’une femme à sa plastique et les surestime au détriment d’autres éléments comme sa personnalité, son humanité ; surtout lorsque l’on est en manque, à la recherche seulement d’une compensation à diverses frustrations, ce qui engendre une obsession à terme perturbante si l’on y consacre trop de temps.

Brutalement dit, il n’est pas sûr par exemple que le fait de voir de bon matin un film porno ou «gore» avant d’aller au lycée à l’atelier ou au bureau soit la bonne solution pour se constituer une image équilibrée de la femme, de l’humanité en général, surtout s’il existe un déficit de repères que l’absence d’une mère, d’un père, d’une amitié, d’une reconnaissance sociale, n’arrange pas.
Mais d’un autre côté imagine-t-on une tv, un cinéma, sans corps, sans séduction, et plus généralement une ville sans panneaux publicitaires, sans ces images chatoyantes un brin coquines qui donnent du piment à la rue ?

Une piste possible de régulation pourrait être d’une part l’approche pédagogique : par exemple à l’école le fait d’apprendre à lire les images, à voir comment elles se fabriquent, à en créer soi-même, à comprendre également pourquoi telle image plutôt qu’une autre excite à tel moment.
D’autre part ce tout dernier aspect peut être approfondi dans des émissions qui insisteraient précisément sur le lien entre nos états d’âme et nos choix d’images. Par exemple lorsque l’on se sent violent, frustré, l’attrait pour des images qui y souscrivent est plus fort. Lorsque l’on se se sent faible invisible peu aimé la compensation cherche toujours des représentations contraires comme une fixation sur certaines poses sexuelles, sur l’organe mâle en érection, l’organe femelle en offrande. Ce qui ne veut pas dire que la recherche compensatoire va jusqu’au passage à l’acte. Il faut d’autres ruptures déclenchantes.

Mais il pourrait être tout de même possible d’avancer l’idée de boulimie d’images comme il existe une boulimie alimentaire. Dans ce cas une diététique, une «diémédiatique» devrait également surgir pour nous aider à désengluer parfois l’âme et les sens de la toile virtuelle ; tout en nous conseillant à mieux en goûter seulement le suc, laissant la lie de côté car celle-ci a besoin d’un traitement, d’un filtre, supplémentaire : celui du journaliste, du chercheur, de l’artiste, pour que nous puissions en comprendre, sans être détruits, ses cris étranges surgissant pourtant de nos propres profondeurs.

( Pour une version "métro" ( page 6 ) cliquer à l'adresse suivante :

http://www.metropoint.com/PDFFiles/FRPAR_FRPAR_20020327A_182118310.PDF?13992

6 mars 2002 (retouché le 14 mars)

Wiesel, Sharon, Arafat.... et la paix.

Elie Wiesel, peu suspect de sympathie pour les partisans des assassins de Rabin, avait écrit, il y a quelques temps, un article dans le Monde où il expliquait que lorsqu'il lisait, entendait, Arafat, deux nouveaux arguments avaient vu le jour en plus de la restitution des territoires d'avant 67 et du démantèlement des implantations : d'une part le retour des trois millions d'exilés non pas dans le futur Etat palestinien mais en Israël même; d'autre part Arafat niait que Jérusalem ait eu historiquement un caractère juif.
Wiesel s'en étonnait en soulignant que jamais Arafat n'avait eu de telles exigences qui ne peuvent que retarder, voire empêcher, la paix.

Ainsi il semble bien que les deux principales pierres d'achoppement n'aient pas été le pourcentage de territoires rendus, ni même les implantations, comme il a été dit par les propagandes diverses, mais ces deux arguments visant le retour et le statut juif de Jérusalem. Or si Arafat veut, réellement, la paix, et si tout processus de cette sorte exige des concessions réciproques, il ne peut pas par exemple placer le problème du retour au même niveau que la constitution de l'Etat palestinien. Que celui-ci naisse, s'installe, se développe ! il sera toujours temps d'en discuter plus tard.
En faire une condition sine qua non dévoilerait au contraire la persistance d'une volonté d'obstruction, même s'il est possible d'en admettre la pertinence c'est-à-dire la nécessité, à terme ; ce qui implique néanmoins pour Israël de promettre, dès maintenant, d'ouvrir, dans un second temps, la discussion sur ce thème, du moins en termes d'indemnisations et de regroupement des familles.

Concernant maintenant les implantations et Jérusalem, il faut tout d’abord ne pas oublier, s’agissant du premier point, que ce ne sont pas de simples «colonies» mais des prises de guerre, celle de 1967, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, -même s’il est dur pour certains palestiniens de l’admettre voire de l’entendre. Cela interdit en tout cas de faire fi de ses habitants juifs, dûment installés depuis 35 ans, et qu’il serait tout autant barbare d’expulser et de toute façon quasi impossible à faire, du moins pacifiquement, tant la détermination des implantés est dense.
Néanmoins il est urgent de négocier avec eux le fait qu’ils doivent payer une taxe foncière et certains impôts locaux à l'Administration palestinienne, et que des palestiniens puissent également s'y installer.

Enfin sur Jérusalem un consensus entre modérés des deux bords semble admettre qu'elle peut devenir simultanément la capitale des deux Etats.

Mais il est exact que tout ceci ne suffit pas et qu’Israël pourrait faire plus pour montrer sa bonne volonté, racheter ses erreurs passées, et ses atermoiements présents. Par exemple du point de vue de la viabilité du futur Etat palestinien, en particulier sur le plan économique. Rappelons que durant la brève accalmie qui a accompagné les accords d’Oslo, les exportations palestiniennes, en particulier d’agrumes, avaient été lourdement taxées. Or une bonne amorce de développement basé sur des échanges justes pèserait beaucoup dans la balance.

D’ailleurs il semble bien que le plan de l’Arabie Saoudite, en crise économique, vise aussi cette perspective qui, somme toute, peut s’inspirer des débuts de l’Union Européenne, avec le Marché du charbon et de l’acier, venant après des siècles sanglants et deux guerres mondiales.

En tout cas si le Président Arafat n'accepte pas cette politique des petits pas, inaugurée par Sadate, alors il démontrera que non seulement il préfère la fonction de chef de guerre à celle de chef d’Etat, mais aussi qu'il signe, en sous-main, des blancs seings aux divers extrémistes de son propre camp dont les actions, loin d'apporter la paix, renforcent, de jour en jour, les assassins de Rabin et leurs illusions du retour à la Palestine biblique. Les partisans du Hamas, par exemple, considèrent la libération des territoires occupés comme une première étape : l'industrie du kamikaze tourne à plein.

Mais elle oublie une chose : Israël ne se retirera pas d’Israël. Comme il l’a fait du Sud Liban.

Si Arafat le croit et s’il pense que les Etats-Unis peuvent l’y obliger il a tort. Des millions de gazés et de fusillés sont dans la tombe et regardent Israël. La paix n’est donc pas une reddition, elle se gagne à deux. Pas en imposant unilatéralement ses conditions. Autrement les immenses souffrances qui, quotidiennement, se nourrissent mutuellement continueront sans fin pour le plus grand bénéfice des profiteurs de mort.

28 février 2002

La base de Guantanamo Bay, et autres réactions à fleur de peau de quelques paumés suburbains ou leur incompréhension devant le non-jeu.

Selon le Libération du 26 février 2002 ( p 3 ) " L'armée devrait commencer à construire dans les jours qui viennent des prisons en béton à Guantanamo Bay pour remplacer les cellules temporaires, mais elle attend toujours le financement promis par le Congrès ". Les cages si spectaculaires vont donc disparaître...Il serait facile de gloser sur la façon étonnante dont les Américains ont l'art et la manière de retourner une certaine opinion contre eux, s'il n'y avait autre chose de bien plus grave...

Ainsi l'on apprend avec stupeur (et agacement grandissant) que certaines belles âmes tonnent de plus en plus fort pour réclamer la libération des détenus. En France par exemple elles exigent que les prisonniers de nationalité française soient libérés et même pensent attaquer en justice pour séquestration...On croit rêver...Comme si tous ces gens disaient : bon, ok, ils ont perdu, game over, rebelote, balle au centre etc...

Pareil en banlieue : un dealer se fait serrer, il avale ses doses, meurt, le quartier est à feu et à sang : comme si tous ces gens se disaient : ok, cut ! on la refait ! c'est bon...mais sans le sang on dirait du vrai...

Conclusion : le principe de réalité, à force d'être pris uniquement pour un "truc du pouvoir" produit des impressions et des croyances renforçant la crédulité native d'ados en rupture de banc...ou d'adultes ONG qui continuent à prendre seulement la vie pour un songe.

Il serait temps qu'ils se "bougent", non ?

23 février 2002

Premiers signes de rébellion techno-urbaine en provenance de Riyad

Je disais dans le billet précédent qu'en Arabie Saoudite la Saint Valentin a été interdite et que des homosexuels condamnés ont été décapités. En même temps le Herald Tribune du vendredi 22 février nous apprend que certains jeunes saoudiens s'ennuient et errent dans les rues en bloquant le trafic, harcelant les femmes au volant, vidant les limousines en transportant fastueusement, et, in fine, se déguisant en femmes pour entrer dans les espaces leur étant réservées, tout en s'en prenant aux policiers :

"Late one night in mid-December on the coastal road in Jidda, about 1,000 young men went wild. According to the Arabic-language Saudi daily, Al Watan, they whooped and hollered, harassed females in passing cars, blocked traffic, attacked police officers and smashed car windows." (...) " Shortly afterward in the city of Dammam, more than a dozen young men surrounded a limousine, beat the driver and dragged his three female passagers out of the car (...)" .

S'agit-il d'islamistes ? Il semble que non, même si le côté " outlaw " de Ben Laden -plutôt que religieux- ne les laissent pas indifférents... En fait il s'agit bien de spleen...mais urbain ; c'est-à-dire lorsque la ville devient étranger à soi et transforme le rêve ambulant, -cher à Simmel lorsqu'il observe Venise ( et que je propose de généraliser conceptuellement...)- en cauchemar permanent puisque rien n'est possible, tout est interdit :

"By all accounts, the youthful exuberance was touched off not by politics but by ennui. Saudi Arabia is, after all, a theocratic kingdom that bans dating, cinemas, concerts halls, discotheques, clubs, theaters and political organizations and offers few oases like museums, librairies or gyms (...) ".

Les causes sont également sociales ( coût prohibitif du mariage, décalage entre éducation traditionnelle et modernité, telle la liberté d'être, même si elle est vue par le prisme déformant des médias ) et économiques ( baisse drastique du prix du pétrole, démographie en hausse, restriction, de fait, de la consommation à cause des interdictions religieuses touchant au comportement, au vestimentaire... ) mais elles n'expliquent pas tout :

"The pressures have left many young people confused and restless, and admiring of the radical defiance of the Saudi-born Osama bin Laden. However, there appears to be little appetite for the terrorism and violence advocated by bin Laden. Rather, young men are rebelling in others ways : by luring police officers into 190-kilometer-per-hour, chases on the freeways, tossing firecrackers into crowds at soccer matches, even disguising themselves as women to infiltrate women-only spaces.

Rebellion often takes the form of Tom-and-Jerry chases with the police. On a main intersection of the capital city, Riyadh, after the soccer game against Qatar, for example, two men stopped traffic, turned up the volume of their rock music, jumped out of their car and started dancing wildly. (...) ".

Certains parents deviennent compréhensifs et permettent que filles et garçons se rencontrent en privé :

" At a recent private party in a mansion in Jidda, a port city that historically has been much freer than Riyadh, about 50 young men and women in various states of dress and undress talked, sipped soft drinks, danced, even groped each other. "

Qu'en penser ? Seulement ceci pour l'instant, du moins en ce qui me concerne : la modernité rime avec la liberté d'être de penser d'entreprendre, au delà du pire et des appétits de puissance qui la dépassent historiquement, c'est ce que j'ai tenté de démontrer à plusieurs reprises.

Il n'est pas étonnant, dans ces conditions, que la jeunesse saoudienne ne puisse plus admettre qu'au sein des différences culturelles il existe des traditions qui se donnent l'apparence d'en être alors qu'elles sont plutôt des expressions de pouvoir absolutiste des hommes sur les femmes, de certains clans sur le peuple et qui se servent de la religion, de " l'exception culturelle ", comme remparts pour préserver leur pouvoir : cela ne vous dit rien quelque part ?...

Les adeptes inquiétants de la " décroissance soutenable ".

En gros et d'après " Serge Latouche", de la revue Silence, cité par Le Monde (du 21 février, p 16) " le développement durable " ne remet pas " en cause le développement existant ". Or pour "sauver la planète et assurer un futur acceptable à nos enfants, il ne faut pas seulement modérer les tendances actuelles, il faut carrément sortir du développement et de l'économisme". Mais pour éviter une "crise" le même article du Monde suggère qu'il faille penser à " une distribution différente des préférences, afin que les consommateurs choisissent des biens immatériels basés sur les relations humaines plutôt que sur les produits matériels dommageables pour l'environnement. " La décroissance matérielle sera une croissance relationnelle sociale et spirituelle ou ne sera pas." " .

J'avais eu vent de cette conception il y a quelques années lors d'un colloque organisé par l'Unesco et dans lequel y était vanté le mode de vie "frugal". Seulement le problème ici comme plus haut se résume à ce précepte simple : personne n'est obligée d'être une victime de la consommation, même si les stimuli sont forts, spécialement pour les milieux modestes, car les flambeurs et autre m'a-tu-vu sortent de tous les horizons. Vous pouvez avoir un bourgeois très riche et très radin par exemple.

Mais autant ceci est convevable autant voir un travailleur aux revenus modestes très festif apparaît, obligatoirement, comme une surcompensation de sa condition. Et un bourgeois très riche et très dépensier sera plutôt perçu comme arrogant que magnificient. Ainsi va la perception...tronquée.

Pour en revenir maintenant au fait d'orienter les préférences plutôt vers les " biens immatériels basés sur les relations humaines plutôt que sur les produits matériels dommageables pour l'environnement" les choses ne sont pas aussi simples. Prenez la voiture. J'ai cru un moment qu'il ne s'agissait que d'une ostentation, surtout en ville. Mais, en fait, et lorsque les conditions de transports collectifs se dégradent, la voiture apparaît beaucoup plus comme une alcôve, un refuge, une extension non seulement de soi mais de "chez soi" : un home sweet home, une part du monde techno-urbain que l'on peut contrôler alors que les infra/super/techno/structures semblent échapper au commun des mortels.

De plus rien n'est vraiment fait, contrairement aux apparences, pour aider à un vrai renforcement de la consommation immatérielle. Prenons un exemple basic : les clubs de sport sont taxés en TVA à 33/% alors que de plus en plus les spécialistes de la santé soulignent qu'un corps en bonne condition physique est plus apte à se défendre immunologiquement et se sent mieux psychiquement ( sans doute par création d'adrélanine et du besoin de dépense -pour les hommes- du trop plein d'énergie ). Les abonnements sont chers. Les clubs bondés car il n'y en a pas partout.

Par ailleurs les échanges culturels -du moins s'il est admis que "la" culture ne se réduit pas seulement à la visite au musée, au cinéma, la consommation passive de bouquins et autres...,-( en apparté sur ce point : dire que la culture n'est pas une marchandise est une hypocrisie sans nom : la culture, comme le monde, est aussi une marchandise et il y en a de qualité, sans parler du luxe...)- les échanges culturels sont, en fait, autant freinés en France que dans le reste du monde...accuser dans ce cas le "néolibéralisme" est facile et sur ce point encore plus faux que d'habitude...

Deux exemples dans le multimédia et la communication média traditionnelle : d'une part Internet : l'abonnement adsl est trop cher, les fournisseurs gardent tout le bénéfice alors que certains sites non marchands peuvent générer de la fréquence et devraient se voir rétrocéder une part de monnaie lorsque l'on vient se brancher chez eux ( voir mon interview à ce propos sur le site http://www.fete-internet.fr , rubrique "quotidien" sous-rubrique " portrait"...)

D'autre part pourquoi ne pas faire en sorte que les institutions, éducation nationale, mairies, organisent des concours divers et variés -ludiques et formatifs- qui inciteraient à cet échange immatériel et ce non seulement en France, mais en Europe et dans le monde entier ?

Le problème n'est alors pas tant d'imposer la " décroissance " et la " frugalité " -et la planète est bien plus riche et résistante -malgré les excès, qu'il faut sanctionner, que nos oiseaux de mauvais augure le croassent- que de penser un développement, durable en effet, qui privilégierait la qualité à la quantité en donnant un coup de pouce fiscal aux consommations préservant l'environnement physique et renforçant la santé physique et mentale...cela inciterait par exemple aussi les industries agro-alimentaires et pharmaceutiques à travailler ensemble pour nous coconcter de vrais "alicaments"...

Il n'y aurait donc pas de comportement politique répressif -sauf contre les tricheurs- mais une préférence démocratiquement choisie : on serait alors loin de la société fermée -et en fait intégriste- que certains nous préparent dans le fond de leur bergerie ; utilisant par exemple, afin de nous nourrir leur diatribe, les méandres de la faiblesse européenne à se battre pour l'affichage-étiquettage des hormones et des OGM, ce qui laisserait libre choix au consommateur...

Ne pas intervenir vigoureusement contre les tricheurs et l'hégémonisme renforce les extrémismes souverainistes et autres "frugalistes"...

En tous cas ce sont ces débats,là, qui devraient se trouver au centre de la campagne électorale française : nous en sommes loin...me semble-t-il.

18 février 2002

Questions d'Egypte

Deux chants de muezzins s’élancèrent en même temps lorsque la lumière tissant le jour se transforma en sas de feu de l’autre côté du Nil.

Le premier chant, dans le lointain, en accompagna mélodiquement le mouvement d’une voix émouvante et mélancolique alors que le second hurla sa complainte comme s’il voulait faire croire que c’était elle qui avait pouvoir sur la lumière du monde et sa montée en astre céleste.

Le premier chant, traditionnel, célébrait, semble-t-il d’une flûte vocale et ensorcelleuse le Mystère du monde en son éclat même, le second chant, idéologique, assénait, mégaphones tonitruants, l’obligation d’entendre sa tonalité surhumaine.

C'était là le pouls égyptien et sans doute moyen-oriental, nord africain : comment accepter une parole qui propose et n'impose pas ? J'eus le sentiment que se jouait l'avenir des sociétés musulmanes et que, peut-être, grâce à la ville d'aujourd'hui, à sa fureur de vivre techno-urbaine, le totalitarisme aurait de plus en plus de mal à uniformiser les âmes comme il le fait par exemple encore à Riyad en Arabie Saoudite en interdisant la Saint Valentin, en décapitant des homosexuels.

11 février 2002

Arrogance ?

Ce mot est maintenant mis à toutes les sauces : il suffit d'exprimer son propre point de vue pour se faire sermonner avec ; spécialement par ceux-là mêmes qui refusent tout autre avis que le leur ; ils n'ont de cesse de balayer toute critique et résistance en agitant ce terme...

Le viol n'est pas un "comportement sexuel" !

La tribune de Iacub et Maniglier dans le Monde daté du 2 février caractérisant le viol et le harcèlement de "comportement sexuels" est hallucinant de mièvreries soi-disantes "nietzschéennes" mais qui reviennent au vieil adage du "il n'y a pas de fumée sans feu" : en effet, si vous pénalisez plus sévèrement un viol qu'un coup de poing -y est-il écrit en substance- alors vous voilà attiré par "l'abîme"...

Ce genre de nihilisme est monnaie courante de nos jours mais il n'empêche qu'il existe tout de même une différence non seulement juridique mais ontologique entre un coup de poing et un viol qui, lui, se range nécessairement sous la qualification de préméditation, ce qui écarte bel et bien le coup de sang...
Et... quand bien même y aurait-il du désir à fantasmer l'infantilisation de l'abandon forcé, nous ne sommes pas (seulement) des pierres qui roulent ( malgré la musique du même nom ) l'éthique nous permet d'avoir des principes capables non seulement de nous conserver de nos propres désirs de compensation mais aussi de s'affiner... Bref...qualifier le harcèlement et le viol de " comportement sexuels" porterait à s'esclaffer s'il ne s'agissait pas plutôt de troubles du comportement et donc de pathologies qu'il s'agit en effet de punir selon la gravité du crime, et aussi de soigner, oui, n'en déplaisent à nos foulcadiens en culottes courtes...

17 Janvier 2002

Atmosphère électorale made in france

Les miasmes s'amoncellent et la France se bloque entre les incendies volontaires et les grèves sauvages. Pourtant l'Euro roule. Mais la classe politique s'aveugle de suffisance. Leurs loups et autres chacals sont prêts à se jeter le linge sale pendant que d'autres petites plumes travailleuses jour et nuit se croient encore sous Napoléon le petit en priant le retour de Victor H pour sauver la The République ; avides de frugalité post historique "ils" espèrent aussi en un balayage généralisé mondial, source possible d'un hypothétique renouveau : danger des hommes providentiels, des situations à raser (gratis) ; comme si le retour vers zéro était une solution...

Pronostic ? Jospin, Chevènement, et Chirac en troisième position : qui l'eut crû?...Hypothèse ? Chirac n'a rien à dire de plus qu'en 95 et surtout il n'est pas crédible. Conclusion : les déçus des deux bords votent Chevènement...Danger : celui-ci n'a pas plus d'idées vraiment décapantes que les deux autres. Mais il est pragmatique et c'est la dernière carte des nostalgiques modérés.

Conclusion : Jospin risque d'être élu dans un fauteuil...

Poncifs

Les Navigators...l'Argentine...Sharon encore...OGM...le "virus libéral" d'ATTAC : Thèmes simplifiés à outrance ( voir aussi mon essai sur ces sujets ) :

Navigators ? Avant la privatisation, 30 ans de vétusté du rail britannique : la privatisation a bon dos, mais confier la régulation au même opérateur fut une grosse bêtise...

L'Argentine ? Les banques internationales et la privatisation sont d'excellents boucs émissaires lorsque les erreurs bureaucratiques font rage et que le FMI n'en est pas exempt en n'articulant pas réforme du budget et réforme structurelle doublées d'un filet social...En un mot les bailleurs de fond ne devraient pas prêter de l'argent sous le seul label d'un budget d'austérité alors que tout autour la corruption et la gabegie ont pris l'ascendant sur le réel.

Sharon... Qui l'a amené au pouvoir ? Arafat. Surtout lorsqu'il refusa le plan Barack, y compris comme étape de son propre point de vue... En fait Israël apparaît comme une une menace non pas parce qu'il occupe du terrain mais surtout parce qu'il représente la modernité, inacceptable pour Arafat puisqu'il y perdrait à terme le pouvoir.

OGM...Pourquoi pas l'étiquettage ? Tout le monde y gagnerait...

Le "virus libéral"... Il y a de bons et de mauvais virus. En tout cas ATTAC n'a pas de vaccin. Moi si...

Dangers

Enrons, sa faillite et sa crapulerie doivent faire date...Le dossier de BusinessWeek daté du 28 janvier 2002 est excellent.

7 Janvier 2002

Le kamikase, le conducteur de loco et les pyromanes australiens : 15 ans

Il est étrange ce kamikase américain s'entêtant à imiter le 11 septembre avec son canif-petit avion, j'y vois peut-être aussi un lien avec cette autre petite bête humaine française agrippée à une loco et ces pyromanes en culottes courtes : un désir d'entrer dans l'écran à la manière de super héros et autres super vilains; un espoir d'exploit et peu importe le pire. Dérèglement de l'écran mental.

Ce qui y est visé consiste à s'incruster dans l'écran comme écrin sans Loft ni Academy, ni Pop. Si tout le monde devient star pourquoi pas transformer le réel en jeu vidéo ?

Succinctement dit c'est le souci de reconnaissance amoncelé en montagnes de blessures symboliques. N'oublions pas également les couples appelant inutilement les pompiers et s'embrassant fiévreusement sous les sirènes comme dans n'importe quelle série tv, illustrant bien ainsi cette dérive du spectaculaire dans le plus petit dénominateur commun : le tag téléphoné...en cri mental.

Autrement formulé, j'y vois là un signe inquiétant d'anomie à la lumière fiévreuse des bagnoles brûlantes.

Que faire ? Je ne sais pas. Peut-être déjà comprendre pourquoi Harry Potter,le seigneur des anneaux, Amélie... ont un tel succès...pour pouvoir s'en servir comme alternative symbolique à discuter avec les humains de 15 ans justement...leur dire que l'espérance de possibles ne doit pas déterminer son tracé uniquement par le médiatiquement correct. Comment expliquer à quelqu'un de 15 ans et à la dérive que la force d'être plutôt que rien, que la peur d'être, se maîtrisent et se sculptent autrement que dans le spectaculaire ?...

( à suivre...)

Exception culturelle ?

Qu'est-ce que "la" culture ? Tout ? N'est-ce pas présomptueux ? Et en matière de politique culturelle ne vaut-il mieux pas définir ce que la dépense publique peut aider ? Certes les acteurs. Mais pour les compagnies et les productions c'est moins simple. C'est qu'il faut bien considérer tout de même une chose : les constances de contenu allant dans le sens d'une réflexion ouverte qui construit au lieu de se contenter de détruire, faire de l'anti-art etc...

Car il y aussi cela : autant imposer un contenu n'est pas de mise, autant dépenser l'argent public pour n'importe quoi est problématique. Solution : que les professionnels compétents assis dans les jurys soient supervisés par une instance indépendante comprenant d'autres professionnels unanimement reconnus et qui surtout auraient un rôle "juridique" : les refusés pourraient faire appel, les débats seraient publics, les refus dûment justifiés.

Aurait-il fallu par exemple subentionner une exposition de ce genre :

Ainsi une exposition temporaire organisée par le Musée du Louvre et la Réunion des musées nationaux, (Commissaire : Régis Michel, conservateur en chef au département des Arts graphiques, musée du Louvre. 19 octobre 2001-14 janvier 2002), énonce dans son texte de présentation :

« (...) Et si c'était vrai ? Si la peinture, qui est, en Occident, le canon séculaire de la culture visuelle, n'avait été que ça : un crime contre l'imaginaire - carcan du corps, miroir de l'idéologie, outil du pouvoir, mystique de l'auteur, principe de tous les fétichismes et de tous les formalismes ? Si elle n'était rien d'autre qu'une machine à sublimer qui n'a cessé de servir le plus sournois des cultes, lequel se nomme, depuis Hegel, la religion de l'art ? On exagère à peine. La thèse n'est pas nouvelle. Mais elle est taboue. Pas touche au patrimoine.

On entend ici méditer à voix haute sur ce que l'on appellera, Bataille aidant, la part maudite d'une modernité qui est, comme on sait, d'obédience picturale. (...).Quelque chose se brise, autour de 1795, dans l'art d'Occident, jusque-là régi par le mythe solaire d'une Grèce introuvable. La révolution fait faillite. Et l'antique avec elle, qui n'est plus qu'un art officiel, voire un art censeur, où le péplum tue la vie. Tout se fige dans l'obsession du marbre. Or cet idéal puritain d'effigies asthéniques paraît souscrire au motif disciplinaire du panopticon, cher à Foucault, qui vise au dressage des corps (et plus). (...)Il s'agit de voir. Entendons : de voir autrement. Le travail de la différence est une expérience des limites qui répudie la violence normative -répressive- de la rationalité abstraite (celle des Lumières), laquelle finit, à en croire Horkheimer et Adorno, par se dévoyer dans l'horreur des camps. (...) «

G.Bataille et M.Foucault, -étudiés précisément ici- sont donc appelés à la rescousse comme cadres de références pour empêcher que la peinture se maintienne comme « violence normative –répressive » laquelle « finit » dans « l’horreur des camps ».

Commentaire du critique d’art Hector Obalk, (Le monde du jeudi 22 novembre 2001) ayant vu l’exposition mélant allègrement « au point de mettre en écho dans la même salle le destin de juifs en pyjama de 1943 avec la violence chiquée et narcissique d’artistes marginaux de 1965 (...) » :

« (...) Quel bénéfice y a-t-il exactement à « libérer » le corps du « contrôle rationnel de nos sociétés policées et répressives », si cette progressive « libération » du corps débouche en réalité sur l’imagerie sans fin de la violence, de l’humiliation, de l’automutilation et de toutes les tortures simulées que l’exposition multiplie jusqu’à la dernière salle ? On ne peut qu’en conclure qu’on vivait mieux « sous le carcan de la norme ». (...) »

Il se trouve que le « bénéfice « est à chercher du côté de cette intention d’empêcher la constitution de toute représentation et donc d’empêcher à la source la possibilité même d’une appréhension, d'un jugement. Je l'ai analysé dans ma thèse.

Mais ici le problème n'est même pas là et plutôt dans le fait de se demander si ce genre d'exposition ne pourrait pas être plutôt financée par des fonds privés émis par exemple par tous ces gens qui font leur carrière dans le nihilisme... Je ne vois en effet vraiment pas pourquoi il faudrait que cela soit l'Etat qui aide ceux sciant sciemment la branche sur lequel l'Art déploie ses branches.

Peut-être qu'entre la censure et le laisser faire laisser passer une autre possibilité pourrait émerger qui consisterait précisément en la mise sur pied d'un peu plus d'indépendance, d'objectivité, d'esprit public en un mot au lieu de s'en prendre à ce bouc émissaire nommé JM Messier ?

27 Décembre 2001

La première erreur de Sharon

Le bonhomme est petit et cela se remarque lorsqu'il fait une belle bêtise. Le fait d'empêcher par exemple Arafat d'aller à la messe ne symbolise pas nécessairement la grandeur éternelle d'Israël et certainement pas celle de Sharon. Alors qu'il pouvait gagner sur tous les tableaux : il montrait sa grandeur d'âme, complexifiait son image quelque part, déjà pour faire oublier sa faute libanaise. Mais jouer à oeil pour oeil est trop tentant et c'est d'autant plus petit que le contraire aurait pu commencer à grignoter la symbolique pro palestienne, par exemple en France.

La bourde de Jospin.

Il avait une occasion en or de damer le pion à Chirac : remplacer les fenêtres à Toulouse en mobilisant un fonds spécial, engager des artisans dans toute la France, en appeler à l'armée, que sais-je... Comment une telle inertie est-elle possible ?

17 Décembre 2001

L'escalade en Palestine, bis.

Il est dommage que la connaissance du passé soit si peu respectée. Je faisais état des articles des De la Campagne et Klarsfeld ( plus bas ) qui signalaient bien qu'en 1948 ce sont les Etats arabes qui ont "conseillé" à 700 000 palestiniens de refuser l'existence d'Israël en le signifiant avec leurs pieds, tout en leur promettant qu'ils reviendraient bientôt.

Or dans un cahier spécial du journal Le Monde daté du 13 décembre ou du 9-10 je ne sais plus, il est certes souligné les méfaits de certains extrémistes sionistes mais ce de telle sorte qu'il semblerait que cela soient ceux-ci qui soient la cause majeure de l'exode palestinien. La guerre avec les Etats arabes est bien notifiée mais sans qu'il y ait une quelconque relation de cause à effet avec cet exode.

De deux choses l'une dans ce cas : l'une de ces diverses sources ment ou du moins édulcore.

Je soutiendrais dans ce cas que l'élucidation complète de ce passé permettrait de clarifier le débat en France biaisé dès le départ par ce flou du commencement.

Par ailleurs il semble bien que mon article intitulé "Arafat vote Sharon " se vérifie. Arafat joue en effet la politique du pire et renforce l'intransigeance de Sharon tout en comptant sur la pression internationale pour la faire capoter. Sauf qu'Arafat se trompe de timing. Ben Laden est passé par là et il semble bien qu'Arafat ne peut guère bénéficier du soutien de l'opinion publique internationale. Sauf en France bien entendu. Et même si les divers gouvernements occidentaux le reconnaissent encore les prochains attentats auront raison de leur naïveté.

A moins qu'Arafat profite de l'occasion pour faire taire déjà ses propres terroristes et cesse de poser en préalable la réintégration en Israël même des trois millions de Palestiniens exilés volontairement et expulsés...par les Jordaniens également...eh oui... après Septembre Noir (1971): 15 mille Palestiniens y furent tués...Qui s'en souvient ?.... Par contre les 200 morts au Liban sous le commandement -indirect- de Sharon font de plus en plus de bruit...Est-ce qu'un tribunal, belge, va enfin se pencher sur la question du massacre jordanien ?

Eloge de l'absurde

En ces temps pré-électoraux la démagogie coule déjà si fort et à flots que la Seine, jalouse, a décidé de bouder en refusant d'envahir Paris comme prévu.

J'aimerais inventer un programme si croquant que tout le monde aimerait le voter tant il serait chou et même ne mangerait pas de pain : pour pas un rond vous auriez le beurre et...et plus encore : bien sûr!

Retour sur le 11 septembre

Il est tout à fait dommage que le directeur de la rédaction du journal le Monde dise dans Paris Match du 6 décembre qu'il voit un lien entre la haine contre l'Amérique et les bombes à fragmentation lâché sur "l'Afghanistan" alors que les bombes visent plutôt les membres de "la Base", même si des morts involontaires ont été dénombrés. Ce premier degré dans le réactionnel semble étonnant. Mais il n'en est rien.

En effet ce propos est bien banal au fin fond de l'intelligentsia de gauche. Il remonte parfois à la surface voilà tout. Tout comme à l'extrême droite d'ailleurs. Car l'antiaméricanisme n'a pas de frontières, surtout idéologiques.

Le pompom en la matière est sans doute détenu par J.E Nabe qui s'est fendu d'un livre intitulé sans rire " une lueur d'espoir" ( ed du Rocher ) avec les ruines fumantes du WTC en couverture. Ou comment espérer en une réaction telle qu'elle balayerait toute civilisation oeuvrant pour adoucir les moeurs du genre humain.

Nabe devrait figurer comme homme de l'année à la une du magazine Time, en compagnie de Ben Laden. Et tout le monde se demanderait qui peut bien être à côté de Nabe...Mais n'est pas nabot qui veut. Il faut suffisamment avoir salivé de haine le fond des ponts aux fantasmes noirs, une trompette au bout du bout en guise d'introduction pour lever ensuite autant de suie et l'essuyer sur le monde sans façon. En criant mort au monde lorsqu'il proteste.

De temps en temps une tête à claque surgit. Il faut se la faire. Pour les dents. L'hygiène des ponts. Aussi. Pourquoi les laisser à la lie ? Hallali! ( et il n'aime pas ce que tu écris...)

5 Décembre 2001

L'escalade en Palestine

L'article d'Arno Klasrsfeld dans Le Monde daté du 5 décembre dit à peu près tout et rejoint au fond celui de Christian de la Campagne ( voir plus bas ) paru cet automne dans la revue Commentaires avec un argument supplémentaire : les implantations seraient le pendant du million d'arabes israéliens, ce qui n'est pas faux.

Par ailleurs ils insistent tous deux sur le fait qu'en 1948 les Etats arabes ont conseillé aux arabes palestiniens de partir, de refuser la création de l'Etat d'Israël: 700 000 ont suivi ce conseil. Avec le résultat que l'on sait.

Ces deux auteurs soulignent également que l'exigence de dernière minute d'Arafat à propos du droit au retour de 3 millions de Palestiniens en Israël même signifiait bien la volonté d'Arafat de refuser la paix, de rester un chef de guerre grassement entretenu par la ligue arabe et l'union européenne pendant que son peuple s'enfonce un peu plus dans la misère et l'industrie de l'adolescent-kamikase.

Or au lieu de rêver à un empire arabe mondial basé sur la force et la parole uniforme il aurait mieux valu négocier avec les israéliens pour qu'ils acceptent un certain nombre de mesures économiques telles que la baisse des droits de douane, l'impôt foncier pour les nouvelles implantations.

Arafat joue la carte du pourrissement et pense pouvoir manipuler les totalitaires pseudo-religieux alors que ceux-ci n'ont qu'une seule chose en tête : créer une tête de pont, oeuf de serpent, comme ils l'ont fait en Afghanistan.

Le miroir mental des images urbaines

Quelque chose m'a frappé en regardant la foule et spécialement certaines femmes samedi soir lorsque j'attendais le métro gare ST Lazare en direction d'Asnières. Je me suis dit qu'en ville, lorsqu'il n'y a plus le clan ou la tribu pour créer le vivier dans lequel l'on rencontre et l'on se marie, mais souvent contre son gré, -d'où la ville aussi-, il ne reste plus que le lieu de travail, le club sportif, les rencontres amicales, et aussi le hasard des rencontres au creux des regards dans les interstices urbaines.

Celui-ci force alors à beaucoup plus d'attention à son apparence dans ces conditions données de solitude pour une part volontaire. Spécialement pour les femmes qui se doivent de se faire plus séductrices au fur et à mesure que leur temps propre est dévoré.

Et lorsque ainsi l'apparence devient le lien principal avec autrui -un peu comme à la Cour de Versailles- je me suis rendu compte qu'il fallait moins y voir une influence des modèles médiatiques qu'une acceptation délibérée de ceux-ci. Puisqu'ils répondent à ce besoin de plaire pour pallier aux manques de réseaux et de roueries.

Les éternels pourfendeurs de la société du spectacle oublient donc souvent de se demander pourquoi le public se laisse tant influencer par la pub, la tv, les médias féminins. N'est-ce pas plutôt parce que ceux-ci indiquent tout de même comment se mettre en valeur ?

Il en est de même pour l'engouement têtu envers la voiture. Il s'agit moins de posséder pour faire signe comme le croit l'école de Debray dans ses cahiers de "médiologie" que de prolonger son propre univers, faisceau chatoyant de symboles personnalisés au lieu de se retrouver réduit à l'état de nombres dans les transports urbains bien insuffisants.

Par contre l'entêtement de certains cyclistes à rouler contre vents et marées pourrait faire sourire s'il n'y avait pas cette opiniâtreté encore ouatée (mais pour combien de temps) à vouloir l'imposer. Comme si la frugalité des campagnes était agitée comme ostentation et refuge à l'attrait mystérieux des corps urbains, cette proximité qui fait d'autant plus fantasmer qu'elle tournoie à la façon d'un rêve.

En fait il faudrait reprendre ce que dit Simmel sur Venise en le généralisant : en se demandant si ce n'est pas cette ubiquité des corps aux apparences disponibles qui nourrit la capacité onirique des esprits et en même temps leur frustration. Et que justement ceux qui s'offusquent de cette eau humaine qui enveloppe les villes vont opter pour la religion du vélo pour faire fonctionner la dynamo du réel aux sillons des campagnes. La suppression de la pub sur affiche ou du moins sa restriction en étant un epiphénomène concret.

A suivre.

Misère du politique en France

Il est dommage qu'un Chritian Blanc ne soit pas plus écouté, qu'il n'ait pas pu bien s'exprimer par exemple lorsqu'il est venu à l'émission d'Ockrent le 25 novembre. Face en effet à un Moscovici qui faisait tourner automatiquement ses cassettes d'arguments industrialisés à vitesse accélérée, on sentait bien que Blanc disait des choses importantes -comme la nécessité d'avoir recours au référendum- mais elles n'étaient pas assez bien ficelées dans l'argumentaire.

Par exemple l'éternelle objection sur les privatisations râtées du train anglais et de l'électricité californienne aurait pu être contré s'il avait été dit qu'au temps de la privatisation du rail par Tatchter il y avait déjà trente années de non investissement. Cela fait aujourd'hui 50 ans. Par ailleurs l'erreur fut de laisser privatiser par la même entreprise l'instance de régulation.

En Californie l'augmentation de la consommation électrique du fait du boom des années 90 en passant du simple au double au moment même où les centrales se privatisaient et perdaient une vue d'ensemble du marché, tout en se fragilisant financièrement, sans oublier l'absence d'une instance de régulation, cette accumulation de facteurs n'a pas aidé à comprendre en quoi les nouvelles réglementations permettraient de gagner en qualité de service.

Il faut seulement veiller à ce que le cahier des charges soit sous le contrôle d'une instance indépendante pour éviter les effets secondaires non désirés.

C'est ce genre de débats -sécurité,éducation, assurances sociales également- qu'il serait bon d'avoir en France dans les mois qui viennent.

27 novembre 2001

Il n'y a pas que les trains qui déraillent

Après J.Baudrillard (dans Le Monde daté du 2 novembre), A.Touraine (27 novembre), M. Serres déraille à son tour (28 novembre). Dommage. Pourquoi en effet vouloir à tout prix comparer l'innommable des camps d'extermination et l'hypertrophie de l'exode urbain couplé à l'incurie bureaucratico-mafieuse ?
Quant aux camps d'enfants anglais plus extrêmes que le Goulag, c'est grossier lorsque l'on sait que le vol d'un hareng saur effectué par un adolescent de 14 ans était loisible d'au moins deux ans de camp dans les années 30 en URSS.

Quelle mouche a piqué Serres ? Après Baudrillard et le désir frénétique de prémonitions Rasbenladines, après Touraine qui compare capitalisme financier et totalitarisme soviétique, voilà donc Serres à la recherche désespérée d'une "accroche" au train vengeur de l'antimondialisation.

Par quel incroyable retour du refoulé nos "penseurs" persistent à jouer de tels airs de flûte ? Ne serait-ce pas parce qu'ils véhiculent encore l'idée du bon sauvage du Sud qu'il faut préserver à tout prix y compris contre lui-même de la folie ratiotinante du Nord ?

A qui le tour dans le jeu du plus "délire" que moi tu meurs ?

25 novembre 2001

L'habit militaire, les femmes et les enfants d'abord

Attirons un instant l'attention sur ce fait : le vêtement militaire, en démocratie, veut symboliser en principe la violence de la loi commune librement établie et luttant contre la mort totalitaire tout en combattant son excès d'utilisation, celle du devenir indifférent, visé pour lui-même.

Chez certaines femmes, non militaires, le port du pantalon kaki signifie surtout qu'elles ont à se battre au quotidien contre d'autres excès telles les convoitises compensatrices des mâles en manque de reconnaissance. Les femmes en kaki signifient aussi qu'elles ont à se battre contre elles-mêmes lorsque leur désir de protection et d'émotion s'emballe dans son contraire en s'enhardissant en direction de la seule force mâle recherchée pour sa puissance, son pouvoir de délimitation.

Chez certains ados l'ambivalence est reine depuis les années 60 : à la fois une demande de sens, un rappel du combat quotidien pour s'affirmer, la sensation aussi d'être seul dans le monde techno-urbain, surtout lorsque le monoparentalisme fait rage.

La vi(ll)e est un combat.

Bagarre entre pompiers et policiers dans les ruines du World Trade Center

D'après la rumeur certains pompiers ne voulaient pas être relevés et désiraient rester en service. Comme s'ils voulaient encore oeuvrer au plus près de cette tragédie qui a remis toutes les pendules à l'heure et a apporté une nouvelle gravité dans tous les sens de ce terme : un sérieux et une nouvelle pesanteur emplie de présages aux sourdes menaces tempérées par certains espoirs de mondialisation de mieux en mieux contrôlée.

Je ne crois donc pas qu'il s'agissait seulement pour ces pompiers de tromper l'ennui dans le quotidien de l'ère du vide, mais plutôt de rester en alerte sur le terrain de la vérité du sens, là où on ne triche plus, même si on le veut...

2 novembre 2001

J. Baudrillard, dans son texte du 2 novembre* -fête des morts- hallucine encore une fois en ayant tout d'abord recours au célèbre jeu du "tous coupables" ou comment le totalitarisme vidange les désirs secrets du "système " c'est-à-dire "nous tous".

En ce qui me concerne je n'ai pas eu envie, du tout, que la monstruosité s'accomplisse le 11 septembre. Baudrillard confond la jalousie, voire l'envie, qui peuvent fomenter une pulsion de mort lorsqu'il s'agit de personnes concrètes et la haine froide issue de déceptions qui mettent en cause l'existence même de la société moderne -de sa liberté en effet récente- à travers l'Amérique.

Baudrillard "baudrillardise" ensuite le réel sommé de tourner autour de sa vision inversée du monde avec ses effets de style ou comment le malin génie vient bêtement s'enfermer à nouveau dans sa petite bouteille de sens : car, pendant ce temps, que fait Baudrillard des motivations propres aux adeptes du grand Califat ?

Que fait-il de la montée en puissance d'une soif mondiale de libertés et de confort techno-urbain s'arrachant des doigts crochus de systèmes certes symboliques mais ô combien inégalitaires et sexistes rêvant à l'éternel retour de l'âge d'or ? Et ne vaut-il mieux vivre l'inégalité en démocratie -tout en luttant contre elle- que dans le monde sans espoir des dictatures, quand bien même celles-ci sont, hélas, supportées, voire engraissées par celle-là?...

La lutte mondiale actuelle ne s'effectue pas entre le simulacre du système et le symbolique ressuscité ( je croyais d'ailleurs que celui-ci était mort pour Baudrillard...) mais entre une vie meilleure, intense et confortable, et une vie morte, grise et frugale.

Baudrillard est fasciné par la zombification de celle-ci et sa féroce, impavide capacité de sortir du cimetierre -où elle s'est enterrée elle-même- pour nous y enfermer aussi. Il est permis de ne pas acquiescer à sa demande et de ne pas écouter le joueur de flûte nous chanter les douceurs de ce précipice.

*( dans "Le Monde" daté 3 novembre ).

28 octobre 2001,

Pourquoi les Talibans dominent-ils toujours en Afghanistan ?

Il semble bien qu'une hypothèse solide peut dorénavant être établie : en basant la loi religieuse au-dessus des lois claniques, les Talibans se hissent au stade d'une théo-monarchie absolue dont la théocratie permet une centralisation du pouvoir et une solution quotidienne des conflits.

L'opposition actuelle avait perdu le pouvoir précisément parce qu'elle n'arrivait pas à faire accepter une loi commune transcendant les intérêts partisans. Le seul moyen de contrecarrer dans ce cas la théo-monarchie absolue serait de passer au stade démocratique en faisant en sorte que l'ensemble des tribus acceptent que leur assemblée se transforme en Constituante.

Une analyse sérieuse des conflits au stade tribal ( par exemple les analyses de J. Baechler dans son livre " démocraties" 1995, ed Calmann Lévy ) permet de comprendre en quoi le stade historique de la suprématie religieuse dans le politique permet le passage vers une cohésion supérieure. Du moins dans le cadre d'une société fermée et basée essentiellement sur l'agriculture et le commerce artisanal.

Car lorsque la société se complexifie du fait du surgissement de la ville et de la division sociale du travail qui en résulte et du fait que le pouvoir se distribue entre plusieurs forces économiquement en devenir à ce moment là de développement, l'unicité du fond -ou la loi commune- et de la forme -ou les moeurs- ne peut plus être maintenue sous la houlette d'une seule vision, celle de l'élite au pouvoir au moment historique considéré.

Dans ces conditions et selon la loi non écrite du développement qui veut que tôt ou tard les libertés de penser et d'entreprendre entraînent les libertés démocratiques, du moins lorsque des forces en suffisance ont intérêt à promouvoir leur devenir dans ce cadre-là, aucune entrave ne pourra empêcher l'Histoire, celle de l'Universel, d'aller au-delà du stade théo-monarchique, bien trop élitiste pour parfaire les besoins du plus grand nombre. C'est l'enjeu actuel.

C'est en même temps et à nouveau une expérimentation grandeur nature pour vérifier que la marche dans l'ère universelle permet oui ou non à l'environnement techno-urbain d'atteindre peu à peu son optimum, c'est-à-dire la mondialisation des problèmes et de leurs solutions au-delà de la fureur et des spasmes de ceux qui ne veulent pas perdre leur pouvoir. Aucun retour vers le passé et la pureté supposée ne peuvent arrêter cependant cette donnée objective. Même la terreur, systématique, des totalitarismes soviétique et nazi n'a pu y arriver.

Sur le conflit israélo-palestinien.

L'article de Christian De la Campagne dans le numéro Automne 2001 de la revue Commentaire est tout à fait probant à une exception près. Il montre tout d'abord en quoi dès 1947-1948, les arabes palestiniens refusent la résolution de l'ONU mettant en place deux Etats en Palestine. Des centaines de milliers d'arabes palestiniens s'exilent délibérément, même si les actions attentats-représailles entre extrémistes des deux bords alimentent aussi les causes de l'exil. De la Campagne confirme également que Nasser s'apprêtait à attaquer en 1967.

Par ailleurs De la Campagne montre bien qu'Arafat avait accepté de signer les accords d'Oslo pour restaurer son crédit international détérioré à la suite de son soutien à Saddam Hussein en 1991. Sitôt signé, Arafat n'a eu de cesse de surenchérir et lorsque le Liban Sud fut évacué il crut pouvoir arracher par la guerre ce qu'il ne pouvait avoir par la négociation. De la Campagne souligne aussi qu'Israël a fait la même erreur que les Américains avec les Talibans en soutenant

Néanmoins De la Campagne n'insiste pas assez sur le fait qu'Israël n'a pas suffisamment ouvert son économie lorsque les accords d'Oslo ont commencé à être appliqués. Les produits palestiniens étaient trop surtaxés, l'eau trop monopolisée, et il aurait fallu proposer tout de suite d'aider à la construction au lieu de soutenir uniquement les nouvelles implantations israéliennes et de laisser l'Autorité palestinienne se débrouiller dans l'administration des choses alors que celle-ci, gangrenée par les gangs politico-mafieux, attentait le moindre prétexte pour reprendre le chemin qui lui apporte tant d'argent : la victimisation.

22 octobre 2001,

La semaine s'est déroulée à l'ombre des frappes sur les totalitaires cachés dans les montagnes afghanes, et les enveloppes contaminées. Le tout dans le faux semblant des tests sur les nouvelles alliances et la prolifération des mauvaises blagues.

Quelque chose d'irréel flotte cependant de plus en plus, une interrogation lancinante: que s'est-il passé le 11 septembre ? Peux-t-on encore aller aux défilés de mode comme si rien ne s'était passé? Il semble bien que oui : comme au temps de la seconde guerre mondiale où le Tout Paris continuait à se déchirer litterairement, aujourd'hui la frivolité reste de mise, même si une sourde demande surgit au détour des regards qui aimeraient se plaire s'il n'y avait cette incertitude du temps.

Tout d'un coup les menaces s'amoncellent, s'affirment, gonflent en tornades. La démocratie, la vie confortable, deviennent brusquement de sérieux trésors. Nous sommes la nouvelle Atlantide, nouvelle, car elle ne coulera pas, Atlantide, puisqu'il nous faut assumer d'être une civilisation du sommet, que les aigris du monde entier nous envie.

15 octobre 2001,

L'irrévocable petitesse d'un certain milieu politico-médiatico-intellectuel parisien malgré l'immonde à nos portes.

Les choses s'aggravent. Les positions se durcissent. Au Sud les peuples voient toujours leur énergie être avidement absorbée par leur propre tyran leur proposant comme seule issue de s'en prendre au bouc émissaire occidental, sommé cependant d'effacer les dettes et d'approvisionner la pompe à finance. Au Nord, en France, de beaux discours sont faits à l'UNESCO et ailleurs. Cela rattrape un peu les compromissions de certains avec le totalitarisme, défilant sans honte sur le pavé parisien, italien, allemand, la bouche emplie d'amalgames. Mais seuls les Anglo-saxons semblent être à hauteur de jeu, même si les espoirs de libération sont encore sujets à caution devant Kaboul.

Et puis quelque chose bascule, doucement : le fait de contaminer en utilisant des armes immondes, confirme et élargit tout à fait clairement le degré de monstruosité atteint le 11 septembre. Même s'il ne s'agit pas des mêmes monstres.

La seule issue à court terme : écraser les bêtes néo-nazies se drapant dans du religieux ou de l'originaire puriste. Les emmener au TPI, pourquoi pas ?

La seule issue à long terme : cesser progressivement d'acheter du pétrole aux pourvoyeurs mielleux qui nourrissent l'une de ces bêtes; ce qui implique d'aller lentement mais sûrement vers le moteur à hydrogène, le nucléaire propre à base de thorium, la maison solaire : d' ici dix à 20 ans.

Il nous faut réduire de toute façon nos relations avec tout pays qui refuse un certain nombre de droits élémentaires, y compris à l'OMC : y accepter la Chine a été une lourde erreur. D'autres pays n'ont rien à y faire. L'embargo contre Cuba ne sert à rien dans ce cas s'il n'y a pas une affirmation claire et nette des positions démocratiques qui ne sont pas obligées d'être tout de suite politiques : elles peuvent être au départ sociales et hygiéniques: comme le fait de refuser que l'on exploite le travail des prisonniers en Chine et ailleurs. Ou que ne soit pas intégrée une certaine formation permanente.

D'aucuns pensent que la levée de toute restriction apportera partout la liberté à terme. Rien n'est moins sûr. Il faudrait déjà, diplomatiquement certes, faire admettre que certaines libertés sont nécessairement pour asseoir un développement durable. Tout pays qui s'y refuserait se verrait regarder comme se mettant de fait hors de la Communauté mondiale..

Pourquoi ne pas ouvrir mondialement le débat ? Pourquoi ne pas organiser un colloque mondial sur ce point afin d'établir une charte internationale ?

C'est un dur combat. Serons-nous capables d'en relever le défi ?

L'avenir nous le dira. Et ne nous trompons jamais sur un point : à trop faire l'ange...

Ne soyons donc jamais dupe.

1 octobre 2001

Lipietz and co ou la pratique de l’amalgame

Partons du propos lipietzien réagissant au 11 septembre : « De quel terreau est née cette forme de fanatisme? Ne nous aveuglons pas: combien de femmes et d'hommes de par le monde, avant de songer à la commune humanité qui les unit aux victimes, ont réprimé un mouvement de satisfaction... « ( Libération du 29-30 septembre 2001, rubrique « rebonds»).
Certes Alain Lipietz a d’autres phrases plus lyriques condamnant l’attentat, tout en le comparant néanmoins avec un quelque chose qui n’a rien à y voir : le tremblement de terre de Mexico c’est-à-dire un évènement indépendant de la volonté des hommes .

Ce qui n’est pas le cas pour le 11 septembre.

Or Lipietz affirme juste une solidarité minimaliste devant toutes les victimes tout en signalant en même temps qu’il a pu existé dans le monde « un mouvement de satisfaction... ». Ne tournons donc pas autour du pot : Lipietz fait peu ou prou partie de ces gens qui pensent que les Américains « récoltent ce qu’ils ont semés » -(alors que ce sont plutôt les Saoudiens qui ont semé...)- comme le soutient d’ailleurs également l’entourage du politicien Jean Pierre Chevènement en France -sans ce que celui-ci le décourage, -le candidat vert s’est seulement ajouté à la liste.

Sauf qu’en pensant ainsi ils nient tous qu’un Ben Laden puisse avoir sa propre stratégie qui n’est pas seulement réactive mais offensive.
Il est de bon ton de cacher son ethnocentrisme latent -et au fond de dire tout bas ce que Berlusconi dit tout haut- en réduisant Ben Laden à l’état de « jouet » ou de « fruit » ayant poussé dans tel « terreau ».

Il est ainsi confortable d’écarter le fait qu’au Sud certains acteurs politiques puissent ne pas seulement vouloir incarner les victimes éternelles du capitalisme conquérant mais aussi et surtout avoir leurs propres raisons. Comme si la monstruosité ne pouvait qu’être issue du Nord !

Certes Lipietz en parle mais seulement d’une phrase : « Les criminels agissent pour leur compte: provoquer une guerre qui leur permette de s'ériger en «guides suprêmes» » pour aller où? Lipietz est muet là dessus. Par contre il peut écrire : « Désormais, les pires criminels, comme hier Saddam Hussein, peuvent passer pour des héros aux yeux des multitudes déshéritées, dès lors qu'ils attaquent les symboles de la mondialisation libérale et de la superpuissance qui l'encadre. »

Or cette dernière assertion est également fausse.

Mettre en avant les victimes de l’embargo onuséen contre L’Irak, -comme le fait aussi Chevènement, sans parler de Le Pen-, ne sert à rien si l’on ne comprend pas que ces victimes sont d’abord celles de Saddam Hussein qui refuse de mettre à bas ses menaces en matière d’armement chimique et nucléaire.

De ce fait la volonté du dictateur irakien n’est pas le simple produit réactif d’une émotion libératrice visant à détruire le joug occidental, mais le résultat d’une stratégie visant d’une part à conquérir la suprématie dans la région, -( la guerre Iran-Irack, qu’il a déclenché, a fait bien plus de morts que ce que les amis de Chevènement et Le Pen attribuent à l’embargo)-, puis d’autre part dans tout le monde arabomusulman. Son attaque du Koweït en 1991 ne s’explique pas autrement.

C’est ce que vise aussi Ben Laden qui est, comme Hussein, le résultat de sa propre décision se nourrissant, bien entendu, des tensions et des incohérences du moment historique, - tel que le soutien américain aux pays de l’islamisme extrême et le refus français de recevoir le feu Commandant Massoud. Mais il est faux d’affirmer que Ben Laden est le « produit » des circonstances, et/ou de la CIA, lorsqu'il fomente ses actes prémédités.

Certes l'on peut admettre qu'un individu, poussé à bout puisse servir de jouet aux "artistes" dont parle Stockhausen en fonçant par exemple avec un bus dans une foule israélienne. Mais il n'est guère crédible de laisser croire que la colère et la haine soient des motifs suffisants pour réaliser le passage à l'acte du 11 septembre 2001 planifié sur des mois. Seule une motivation supérieure peut accompagner, supporter, tout le long de l’effort, ce type d’action.

Quelle motivation ?

Pour Ben Laden et ses amis la domination mondiale d'un système crypto-religieux dans lequel les femmes sont effacées, évincées du jeu social, les homosexuels tués, les danses interdites, les cafés, la diversité de l’habillement, la télévision, l’image, la musique, de même que les applaudissements aux évènements sportifs. L'enfermement comme raison. Les « Talibans » - le terme signifiant « étudiants », ne sont pas une spécificité afghane mais l’avant garde mondiale de ce que désirent toute cette mouvance totalitaire se servant de la religion comme justification et propagande.

Or les reportages sur la fabrication des « martyrs » au Liban montrent tous que ce qui est d’abord rejeté ce sont les mutations qu’apportent la civilisation moderne.
L'attentat à la discothèque de Tel Aviv par exemple n'était pas seulement l'expression exacerbée de désespérés plus ou moins manipulés pour certains d'entre-eux mais aussi et surtout le signe d'un totalitarisme en marche qui interdirait toute discothèque, même palestinienne.

Dans ces conditions stratégiques l’attentat multiple aux USA du 11 septembre 2001 n’intervient pas contre la politique de soutien à Israël, même s’il s’en nourrit, mais contre la société moderne dont les USA sont l’emblème.

Ce n’est donc pas un acte « terroriste » qui suppose des revendications non satisfaites, voire un extrémum d’exaspérations poussées à bout. C’est un acte de guerre effectué par ceux-là mêmes qui veulent pas venger les « dominés » mais imposer leur système totalitaire.

A moins de penser que quelqu’un de non occidental serait incapable d’une telle visés stratégique ?

Mais y aurait-il deux poids et deux mesures disent les mêmes en montrant du doigt les « crimes » du Nord, du « capitalisme », du « sionisme « que personne ne pleure ? A cette question, duplice, une réponse, objective, doit être cependant donnée.

Il ne faut pas confondre acte intentionnel, prémédité, et acte de représailles, certes regrettable et que l’on a vu maintes fois en Inde, en Afrique, en Amérique lors de la colonisation, mais qui peut s'expliquer de la manière suivante, en prenant l’exemple du conflit israélo-palestinien : contrairement à ce que prétend l'aile "dure" palestinienne qui veut faire capoter à chaque fois les cesser le feu proposé par Arafat, il ne s'agit pas pour elle de "résister" sur des territoires, gagnés en 1967 par Israël à un contre trois, et que le plan Barack voulait rendre à 95%, il s'agit de s'en servir comme première étape, base arrière, pour détruire ensuite Israël. Puis s'emparer de la Jordanie de l'Egypte, aller vers l'Arabie Saoudite parce que son pétrole s'avère nécessaire pour acheter les armes fatales qui apporteront enfin la domination mondiale que prépare l'attentat du 11 septembre.

D'un côté donc le meurtre prémédité se veut fondateur, c'est la règle. De l'autre il reste réactif, et c'est l'exception. C'est toute la différence entre les démocraties et les régimes totalitaires.

Mettre alors sur le même plan, comme le font les totalitaires et leurs alliés, les massacres d’Amérindiens, la Shoah, les bombardements, classiques, de Dresde, nucléaires, d’Hiroshima et de Naguasaki, au napalm du Vietnam, et certains massacres de Palestiniens au Liban, c’est confondre crimes de guerre, crimes expansionnistes, certes inexcusables, mais qui n’ont pas pour objet la destruction systématique d’un peuple ou d’une classe, en tant que tel, et précisément les crimes contre l’Humanité qui puisent leur existence dans cette réalisation même.

Les nazis avaient par exemple comme projet, fondateur, de détruire tout Juif. Pour tuer le capitalisme et la civilisation moderne en même temps comme le disait Léo Strauss .

Le problème n’est pas d’accuser, d’excuser, compter les morts, mais de laisser croire qu’il existe une similitude entre des crimes de guerre circonstanciés et des crimes totalitaires qui se fondent sur la destruction même de l’autre en tant qu’autre, race et/ou classe.

Les attentats du réseau Ben Laden et du réseau intégriste palestinien relèvent de ce dernier schéma. Ils ne dépendent donc pas d’une réaction d’une partie exacerbée du Sud contre « l’Empire américain » mais se servent des incohérences du développement mondial, -en particulier l’oppression militaro-mafieuse maintenant les populations du Sud dans la pauvreté et la disette, comme ingrédients pour nourrir leur stratégie de conquète mondiale. Il ne faut pas la sous-estimer. Le groupe d’Hitler se comptait en poignées dans les années 20.

Ainsi s’il est vrai que pour la contrecarrer il faille aussi réduire les foyers de tension qui peuvent l’alimenter , il ne faut pas oublier que celle-ci se servira toujours du moindre défaut, injustice, comme justification. Comme le faisait, en son temps de gloire, le mouvement léniniste.
Lipietz est bien loin visiblement de ce genre d’analyse. Il n’est pas le seul. A oeuvrer dans l’ignoble. Il suffit de lire les pages de débats des quotidiens français pour s'en rendre compte.

20 septembre 2001

Morts en Amérique et morts en Palestine,

Certaines inquiétudes et autres incompréhensions se sont fait jour dans quelques écoles françaises vendredi 14 septembre lors des trois minutes de silence. Y aurait-il donc deux poids et deux mesures pour les morts ?
A cette question, légitime, une réponse pourrait être donnée.
Elle consiste à distinguer l'acte de guerre du 11 septembre dont l'unique but a été d'attaquer pour tuer en vue d'imposer mondialement un ordre social uniquement tourné vers la domination uniforme et totale des âmes et des corps, et tel acte réactif israélien se soldant certes parfois par la mort mais en ce sens qu'il ne s'agit pas de tuer du Palestinien en tant que tel (sauf exception intégriste ) mais de se protéger lorsqu'il ne s'agit plus de pierres ces temps-ci mais de balles et de bombes.

Il ne faut donc pas confondre acte intentionnel, prémédité, et acte réactif, certes regrettable, mais qui peut s'expliquer de la manière suivante : contrairement à ce que prétend l'aile "dure" palestinienne qui veut faire capoter le cesser le feu proposé par Arafat, il ne s'agit pas pour elle de "résister" sur des territoires, gagnés en 1967 par Israël à un contre trois, et que le plan Barack voulait rendre à 95%, il s'agit de s'en servir comme première étape, base arrière, pour détruire ensuite Israël puis enfin s'emparer de la Jordanie de l'Egypte, aller vers l'Arabie Saoudite parce que son pétrole s'avère nécessaire pour acheter les armes fatales qui apporteront la domination mondiale que prépare l'attentat du 11 septembre.
D'un côté donc le meurtre prémédité se veut fondateur, c'est la règle. De l'autre il reste réactif, et c'est l'exception. C'est toute la différence entre les démocraties et les régimes totalitaires.

19 septembre 2001

Ben Laden n'est ni un produit américain ni un fruit de l'Histoire et il faut lui fermer le Ciel,

Le terroriste en général est le résultat de sa propre décision. Celle-ci se nourrit certes des tensions et des incohérences du moment historique. Mais il est faux de prétendre que les hommes sont les jouets des circonstances lorsqu'il s'agit d'actes prémédités. Si l'on peut admettre qu'un individu poussé à bout puisse servir de jouet aux "artistes" dont parle Stockhausen, il n'est guère crédible de laisser croire qu'il soit possible d'être à cran durant tout ce temps pour réaliser un tel passage à l'acte. Seule une motivation supérieure à la réactivité d'un coup de tête peut alimenter celui-ci. Quelle motivation ? La domination mondiale d'un système crypto-religieux dans lequel les femmes sont effacées, les homosexuels tués, les danses interdites, de même que les applaudissements aux évènements sportifs. L'enfermement comme raison. Même Dieu lorsqu'il chassa Adam et Eve du Paradis n'avait pas été aussi loin. Le décalage est total. Le blasphème aussi.

LSO